Cinq mois après la réélection de Bouteflika pour un quatrième mandat : l’opposition tâtonne

Près de cinq mois après la reconduction du président Bouteflika pour un quatrième mandat, l’opposition n’arrive toujours pas à serrer les rangs pour une feuille de route commune. Si toutes les parties qui la constituent sont d’accord sur la nécessité de changer le système politique, elles divergent cependant sur la manière de faire. Chacun y va de sa chanson et joue sa partition à sa façon et selon son rythme. Certes, les initiatives fusent de partout, mais sans offrir la moindre possibilité d’entente entre les différents acteurs sur un minimum vital. Si la conférence du 10 juin dernier à Alger avait donné espoir à certains acteurs de voir, enfin, l’opposition parler d’une seule voix, le temps a fini par donner raison aux plus pessimistes. La preuve en est qu’aujourd’hui, la Coordination pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD), à l’origine de cette conférence qui a pu réunir tous les acteurs de l’opposition autour de la même table, peine gravement à réunir ces mêmes acteurs pour se concerter sur l’installation d’une instance de suivi et de coordination. Hormis ses membres, à savoir le MSP, le RCD, le FJD, Ennahda et l’ancien chef de gouvernement Ahmed Benbitour, cette coordination n’a reçu presque aucune réponse positive à ses invitations adressées à d’autres formations et personnalités de l’opposition. Outre le FFS qui met en avant sa propre initiative de consensus national, d’autres entités politiques ont décliné l’invitation. Les luttes de leadership font que tous les acteurs de l’opposition veulent jouer le premier rôle, qu’ils ne peuvent obtenir que s’ils sont les parrains du projet. C’est ainsi que l’ancien chef de gouvernement sous Chadli Bendjedid, Mouloud Hamrouche, a pris son bâton du pèlerin pour sillonner l’Algérie profonde à la recherche de soutiens et d’appuis plutôt populaires. Comme le célèbre avocat et militant des droits de l’Homme, Mouloud Hamrouche, appelle l’armée à jouer son rôle pour ce «changement démocratique» impératif pour l’avenir du pays. Le Pôle des forces du changement, coordonné par l’ex-candidat à la présidentielle du 17 avril Ali Benflis, active de son côté pour mobiliser la majorité silencieuse et susciter l’intérêt de ceux qui se sont mis, jusque-là, à l’écart du jeu politique. S’il affirme sa volonté de rassembler l’opposition, il n’adhère pas forcément au projet de la CNLTD. Ce pôle ne veut pas rompre avec le système, mais veut le transformer pour plus de justice, de libertés et d’égalité. Ce qui complique encore davantage cette volonté de rassembler, c’est le fait que certains membres de ce pôle entretiennent des relations plutôt conflictuelles avec d’autres acteurs de l’opposition. Par exemple, il est un secret de polichinelle que le RCD, un des membres fondateurs de la CNLTD, ne porte pas sur ses tablettes Ali Benflis qu’il considère comme un «éternel pion» du pouvoir. Aussi, les islamistes d’El-Islah, qui font partie du Pôle du changement, refusent de faire la moindre alliance avec la nouvelle formation dirigée par leur ennemi juré Abdallah Djaballah, le FJD en l’occurrence. Et au sein même de la CNLTD, majoritairement islamiste, il y a beaucoup de méfiance. Le RCD, qui ne partage pas grand-chose avec les autres membres, s’est plusieurs fois distingué par des actions qui n’ont pas suscité l’adhésion des autres membres. A titre indicatif, sa revendication de l’officialisation de tamazight ne figure pas parmi les priorités des autres membres de la Coordination. Ainsi, si elle est encouragée et stimulée par l’effacement du président Bouteflika, l’opposition tâtonne. Elle avance dans le noir, sans connaître la destination finale.
Rafik Meddour
 

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