Données inquiétantes du FMI sur l’économie algérienne

Selon les prévisions du FMI publiées le 25 avril 2016 dans son rapport sur les perspectives de croissance dans la région Moyen-Orient-Afrique du Nord-Afghanistan-Pakistan (Moanap), le produit intérieur brut nominal de l'Algérie (PIB) devrait s'établir à 166 milliards de dollars en 2016 contre 172,3 milliards en 2015, avec une hausse du taux de chômage. En 2016, les exportations devraient enregistrer une baisse à 27,7 milliards de dollars contre 38,4 milliards en 2015, mais devraient progresser en 2017 à 32,3 milliards de dollars. Pour avoir un équilibre budgétaire toujours selon le FMI, l'Algérie aura besoin, en 2016, d'un prix de pétrole de 87,6 dollars/baril contre 109,8 dollars/baril en 2015. Le déficit budgétaire devrait s'élever à 15% du PIB en 2016 (contre 15,9% en 2015) et pourrait se réduire à 11,8% en 2017. Les importations en 2016 sont estimées à 57,5 milliards de dollars contre 63,7 milliards de dollars en 2015, et devrait atteindre en 2017 61,3 milliards de dollars, une contradiction puisque le FMI souligne une réduction du déficit budgétaire. Le déficit de la balance des comptes courants atteindra -28,3 milliards de dollars en 2016 contre -27 milliards de dollars en 2015. Et -28,2 milliards de dollars en 2017. Les réserves officielles de l'Algérie devraient reculer sous l'effet de la chute des prix de pétrole à 113,3 milliards de dollars en 2016 en couvrant 22,2 mois d'importations, contre 142,6 milliards de dollars en 2015 et poursuivront leur contraction à 92,3 milliards de dollars en 2017. L'Algérie a besoin de remettre de l'ordre dans ses statistiques, outil de prévision par excellence pour le gouvernement, car le FMI ou la Banque mondiale reprennent souvent les données gouvernementales, notamment celles de la Banque d'Algérie. En effet, ces données ne corroborent pas les dernières données du Centre national des statistiques des Douanes (Cnis). En effet, le déficit commercial de l'Algérie a atteint 5,616 milliards de dollars durant le premier trimestre 2016 contre 3,464 milliards pour la même période 2015 du fait de la baisse des cours du brut de plus de 70%, le prix de cession du gaz représentant 33% environ des recettes de Sonatrach, étant indexé sur celui du pétrole. Les exportations ont baissé à 5,914 milliards de dollars durant les trois premiers mois de 2016 contre 9,8 milliards de dollars durant la même période de 2015, en recul de 39,65%. Les importations, malgré toutes les restrictions annoncées par le gouvernement, se chiffrent à 11,53 milliards de dollars contre 13,264 milliards de dollars pour la même période 2015 et le taux de couverture des importations par les exportations a été de 51% durant le premier trimestre de l'année 2016 contre 74% à la même période de 2015. Et sur les 11,53 milliards de dollars d'importations enregistrées, un montant de 6,64 milliards a été payé par cash (57,55% des importations), une légère baisse de 14,01% par rapport au premier trimestre 2015. Les hydrocarbures constituent l'essentiel des exportations durant le premier trimestre 2015 avec 93,19% avec un montant de 5,511 milliards de dollars contre 9,142 milliards à la même période de 2015 (-39,72%). Mais les exportations hors hydrocarbures, 6,81% du montant global des exportations, ont diminué à 403 millions de dollars, en baisse de 38,75%, étant composées des demi-produits avec 316 millions de dollars, l'essentiel, plus de 70%, étant des dérivées d'hydrocarbures, les biens alimentaires avec un montant dérisoire de 66 millions de dollars et les biens d'équipement industriels avec six millions de dollars. En résumé, le FMI doit nous fournir sa base de données et les statistiques douanières doivent donc nous préciser si ces données concernent la balance commerciale ou la balance des paiements, seuls documents qui reflètent la situation financière du pays incluant les services et les transferts légaux de capitaux. Ainsi, si on part de l'hypothèse du même rythme des importations et exportations de marchandises durant les trois derniers trimestres restants et si on inclut les services qui fluctue de 2010 à 2014 entre 10 et 12 milliards de dollars et les transferts légaux de capitaux des firmes étrangères ente 4 et 6 milliards de dollars, le déficit de la balance commerciale étant extrapolé pour 2016 à 22 milliards de dollars, le déficit global fluctuerait entre 36 et 40 milliards de dollars. Au rythme actuel, les réserves de change – 143 milliards de dollars au 1er janvier 2016 – pourraient clôturer entre 107 et 103 milliards de dollars fin 2016 et pourraient s'épuiser entre 2018 et 2019. Par ailleurs, avec le fort déficit budgétaire prévu dans la loi de finances 2016, le risque est l'épuisement du Fonds de régulation des recettes courant 2017. En bref, on assiste en ce mois d'avril 2016 à une véritable cacophonie, des discours contradictoires entre ministres, notamment ceux des Finances et de l'Industrie concernant le recours à l'endettement extérieur, donnant une mauvaise image de l'Algérie et démobilisant tant les investisseurs locaux qu'internationaux. L'Algérie a besoin d'un discours cohérent transparent, une nouvelle politique économique faite non de lois bureaucratiques ; on doute qu'un nouveau code d'investissement puisse dynamiser les sections hors rente sans s'attaquer au fonctionnement réel de la société, passant par de profondes réformes structurelles dans le cadre des valeurs internationales, si on veut éviter le retour au FMI à l’horizon 2018-2019.
Abderrahmane Mebtoul
Professeur des universités, expert international

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