Arrêt du processus électoral : l’énigmatique volte-face de Sid-Ahmed Ghozali
Alors que le Front des forces socialistes (FFS) – considéré comme le principal parti d’opposition et que l’on ne peut soupçonner de complaisance avec le «système» – a décidé de participer aux élections législatives du 10 mai, convaincu d’œuvrer, comme l’a souligné son premier secrétaire, «à la cohésion et à la stabilité du pays», l’appel au boycott vient cette fois, contre toute attente, d’une personnalité qui a été carrément créée par le «système». Plusieurs fois ministre puis chef du gouvernement de juin 1991 à juillet 1992, ensuite ambassadeur, Sid-Ahmed Ghozali appelle les Algériens à ne pas aller voter à un moment crucial de la vie du pays. Ahmed Ouyahia sait de quoi il parle quand il déclare que la sortie de Ghozali est «une atteinte à la quiétude et à la cohésion sociales».
Mais le plus curieux dans l’interview accordée par Ghozali à El Khabar, est la légitimité qu’il offre à ce qu’il appelle «victoire du FIS», dans des élections qu’il avait qualifiées, lui-même, à l’époque de «ni propres, ni honnêtes». Plus de vingt ans sont passés depuis ce jour de décembre 1991, mais la mémoire est encore intacte chez la plupart des femmes et des hommes qui avaient alors courageusement réagi pour éviter à notre pays de «sombrer dans le chaos et l’obscurantisme islamiste» pour reprendre les termes de Leila Aslaoui.
Dans une contribution publiée dans Le Soir d’Algérie, elle rappelle à l’ancien chef du gouvernement les raisons qu’il avait alors avancées pour justifier la suspension du processus électoral : l’ex-FIS a «usé et abusé de stratagèmes et de magouilles propres à lui assurer une victoire certaine» ; «un million de cartes non distribuées par les APC FIS aux électeurs connus pour leurs positions et convictions républicaines» ; «fraudes massives et manipulations des listes électorales» par l’ex-FIS qui avait ressuscité des morts pour les faire voter…
Comment expliquer que Ghozali joue la carte de l’abstention dans ce moment précis ? Lui qui aurait dû plutôt appeler à empêcher le retour aux affres des années 90 et travailler à un changement pacifique et dans l’intérêt de l’Algérie avant tout. L’énigme reste entière.
Messaoud Mekhalef