Guerre d’Algérie : Arte veut recadrer le débat en France

Après l’émission de France 2 vivement critiquée «Guerre d’Algérie, la déchirure», la chaîne franco-allemande Arte semble s’inscrire dans une démarche plus professionnelle et objective pour célébrer le cinquantenaire de l'indépendance de l'Algérie. Ainsi, elle diffusera ce mardi un documentaire inédit sur l’embuscade de Palestro. Ce documentaire est l’adaptation de L’embuscade de Palestro, une enquête de l’universitaire Raphaëlle Branche sur cet événement, publiée sous forme d’un livre en 2010 aux Editions Armand Collin (France) et en 2011 aux Editions Casbah (Algérie). Cette jeune historienne est connue pour ses nombreux travaux sur la torture pendant la guerre d’Algérie. Des travaux qui ont fait autorité aussi bien en France qu’en Algérie. Son enquête avait déjà suscité de vives réactions en France, notamment de la part des partisans de l’Algérie française. Adaptée en film documentaire par le talentueux Rémi Lainé, cette passionnante enquête nous renvoie au milieu de la guerre de Libération nationale, plus exactement en Kabylie. Elle montre comment la mort de vingt soldats français dans une embuscade, en 1956 en Kabylie, provoque un déchaînement de violences sans précédent de l’armée coloniale contre une population sans défense et toujours considérée comme indigène. L’histoire commence le 18 mai 1956. Vingt militaires français tombent dans une embuscade montée par des maquisards d’Ali Khodja, sur les hauteurs des gorges de Palestro. L’embuscade suscite une forte émotion en France. Le gouvernement colonial décide de répliquer de la manière la plus forte. Il envoie des renforts, et une répression brutale (passage à tabac de suspects arrêtés, exécutions sommaires, déplacement de populations) s’abat sur cette région de la Kabylie, dont le seul tort était de s’être soulevée contre l’ordre colonial. Nourri de témoignages recueillis des deux côtés, français et algérien, de documents pour la plupart inédits et d’images splendides de ces terres qui ont plusieurs fois brutalement changé de main, le film remonte le cours des violences qui ont marqué l’histoire coloniale de la vallée de la Soummam. Ce documentaire rappelle ainsi cette guerre terrible menée par l’armée coloniale contre des populations civiles. Une guerre des plus abominables. «Le film livre une véritable autopsie de cet événement sanglant. L’acte guerrier fait ainsi écho à d’autres exécutions, racontées dans les familles de génération en génération, transmises par les chants, les récits et les reliques : des histoires ponctuées de tueries, de dépossession des terres et d’exodes. Et on s’interroge : quelle fut la durée réelle de la guerre d’Algérie ? N’aurait-elle pas plutôt éclaté dès 1830 ?» s’interroge-t-on dans la présentation de ce documentaire qui risque de déplaire aux nostalgiques de l’Algérie française. A voir.
Sofiane B.