Les Etats-Unis perdent l’Amérique latine et confirment leur isolement
La sixième réunion au sommet des chefs d’État et de gouvernement du continent américain appelé sommet des Amériques, qui s’est tenu samedi dans le port caribéen de Carthagène, risque d’être la dernière du genre. «Il n'y a pas eu de déclaration parce qu'il n'y a pas eu d'accord», a annoncé le président colombien Juan Manuel Santos, à l'issue de cette rencontre qui a réuni une trentaine de dirigeants des pays de l'Organisation des Etats américains (OEA). Le différend qui oppose la majorité des pays présents à cette conférence continentale aux Etats-Unis porte sur Cuba. Exclue de l'OEA depuis un demi-siècle et le blocus économique infligé par les Etats-Unis, Cuba n'a jamais assisté à ces sommets organisés tous les trois ans depuis 1994, ni demandé sa réintégration. Mais aujourd’hui, «la majorité des pays soutient la participation de Cuba», a déclaré M. Santos, qui a qualifié d'«anachronisme» cette exclusion. Seuls les Etats-Unis et le Canada s'y opposent.
Les présidents équatorien Rafael Correa et nicaraguayen Daniel Ortega ont boudé le sommet en Colombie, auquel était aussi absent le dirigeant vénézuélien Hugo Chavez, retenu à Cuba pour son traitement contre le cancer.
Depuis La Havane, dans un article publié dimanche par la presse cubaine, Fidel Castro a ironisé sur la mise en minorité du président américain Barack Obama qu'il a jugé «pensif et parfois absent» lors des débats.
La survie du sommet des Amériques se trouve désormais clairement posée. Les pays de l’Alba (Alliance bolivarienne pour les Amériques) ont lancé un ultimatum, brandissant la menace d'un boycottage. L’Alba, créée en 2004 par Cuba et le Venezuela, devenue Alba/TCP (Traité de commerce des peuples) à l’initiative du président bolivien Evo Morales, comprend actuellement 8 États : trois d’Amérique du Sud (la Bolivie, l’Équateur et le Venezuela), un d’Amérique centrale (le Nicaragua) et quatre de la Caraïbe (Cuba, Antigua-et-Barbuda, La Dominique et Saint-Vincent-et-les-Grenadines, ces trois derniers de langue anglaise). Le Honduras qui en faisait partie en a été retiré par le gouvernement issu du coup d’État de 2009 contre le président Manuel Zelaya.
Entre 1994, année où ce Forum a été créé, et 2012, l’Amérique latine et les Caraïbes ont beaucoup évolué. D’importants changements politiques et une représentation plus légitime des intérêts de ses peuples ont permis à cette région, jadis arrière-cour des Etats-Unis, de consolider son indépendance. Cette région mise à présent sur une nouvelle organisation : la Communauté des États latino-américains et des Caraïbes (Celac).
R. O.