Dossier Algérie : les journalistes du Monde dénoncent l’amalgame
La Société des rédacteurs du quotidien français Le Monde, SRM, vient de protester contre la publication d’un supplément de 16 pages exclusivement dédié à l’Algérie. La SRM (actionnaire du journal), dans un communiqué au vitriol, estime que ce carnet publié, aujourd’hui, sous l’intitulé «Stratégies internationales, spécial Algérie», «entretient la confusion avec une information journalistique indépendante, tant sur le fond que sur la forme». Publié sous une forme journalistique, ce supplément n’est, en fait, qu’un carnet publicitaire. Raison pour laquelle la SRM s’élève énergiquement contre cette confusion tant que «la Une du quotidien ne fait nulle mention du caractère publicitaire et commercial de cette opération». En revanche, une mention «publi-communiqué» est mentionnée sur le journal, ce qui a attiré la suspicion chez la SRM. Celle-ci dénonce le fait que ce supplément soit réalisé par une agence de communication, sans qu’elle soit consultée. Le hic est que beaucoup de médias ont fait leurs choux gras en annonçant qu’il s’agit d’un entretien du président algérien Bouteflika. Y compris l’Agence presse service (APS) qui a repris, ce matin, dans une dépêche, les propos du chef de l’Etat algérien comme extraits «d’un entretien au journal français Le Monde». Mais selon la SRM, la vérité est ailleurs ! «Ce supplément est destiné à promouvoir l'Algérie tout en recueillant des publicités d'entreprises algériennes.» Cette grave révélation met en cause la crédibilité du quotidien Le Monde et remet au goût du jour l’usage abusif de l’argent du contribuable algérien. Très vite, la direction du Monde a réagi. Elle se défend bec et ongles contre de tels amalgames et «se réserve toute possibilité de faire valoir en justice ses droits si de tels agissements ou communications inappropriées devaient à nouveau porter préjudice à l’intégrité et à l’indépendance de ses rédactions». Prête à aller loin, la SRM écrit encore : «Ce supplément nuit gravement à la crédibilité du journal et au travail des rédacteurs du Monde (…) C’est un communiqué de presse, rédigé par une agence extérieure, utilisant le logo du Monde, en contravention de nos règles et sans signaler le caractère commercial de ce supplément.» Un communiqué qui, selon la SRM, a été envoyé à l’Association de la presse diplomatique française. Au-delà de cet aspect inhérent à la polémique et à la levée de boucliers entre les journalistes et les actionnaires du journal, il s’agit également de cette gestion incommode de la communication en Algérie et du financement des boîtes étrangères d’une manière opaque pour promouvoir l’image du président algérien et de son gouvernement. Car au stade où les choses sont arrivées, il est à se demander comment le gouvernement algérien a accepté une prestation de service d’une agence étrangère pour promouvoir son image à l’étranger. Pis, cette agence, selon la SRM, ne vise qu’à engranger de l’argent en convoitant un marché publicitaire algérien en pleine extension. Le commun des mortels ne fera qu’un seul constat : l’Algérie, un pays qui compte. Par son argent, bien sûr !
Yanis B.
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