Les médias américains peuvent-ils trouver un terrain d’entente en matière de religion et de politique ?
Aux Etats-Unis, un pays fier de son pluralisme religieux, la couverture médiatique que suscite la religion tient continuellement compte du discours politique et de l'isoloir.
Aux Etats-Unis, un pays fier de son pluralisme religieux, la couverture médiatique que suscite la religion tient continuellement compte du discours politique et de l'isoloir.
Dans le cadre de la couverture médiatique des élections, la religion – en particulier l'islam et le mormonisme – a été traitée comme un «sujet de discorde» divisant les Américains ou comme un poids politique pour les candidats. Durant la campagne électorale, les médias s'intéressent souvent aux appartenances religieuses des candidats, aux associations dotées de personnalités religieuses de premier plan et aux opinions générales sur des questions importantes aux yeux de certains groupes religieux telles que des controverses politiques. Les médias jouent un rôle déterminant dans la manière de percevoir la religion aux Etats-Unis – les médias peuvent faire beaucoup pour promouvoir une vision plus nuancée de la religion, notamment au regard de sa relation avec la politique.
Au cours de l'élection présidentielle de 2008, par exemple, le sujet religieux le plus fréquemment commenté dans les médias américains portait sur une rumeur infondée – rumeur selon laquelle le sénateur Barack Obama était musulman. Cette information, selon le Pew Forum sur la religion et la vie publique, a constitué un tiers de la couverture médiatique axée sur la religion durant ladite campagne électorale.
En 2011, d'après un rapport du Pew Forum, six des dix sujets les plus fréquemment commentés dans les médias se rapportaient à des événements et controverses en relation avec l'islam et les musulmans dont les audiences du représentant Peter King sur l'«islam radical», les mesures anti-islamiques, les commémorations du 11 septembre et le Printemps arabe. La couverture médiatico- politique de ces événements a semblé en faire des problèmes de sécurité nationale.
Récemment, la couverture médiatique de l'islam liée aux élections a surtout porté, d'une part, sur les affirmations infondées de cinq membres du Congrès pour lesquels certains musulmans faisant partie du gouvernement seraient liés aux Frères musulmans et, d'autre part, sur des rapports faisant état d'une légère augmentation du nombre d'Américains continuant de penser que Barack Obama est musulman, par rapport à la période ayant précédé les élections de 2008.
Selon un rapport du Pew Forum, les questions sur la foi dans la politique présidentielle, en relation avec le mormonisme notamment, ont aussi été abondamment traitées dans les médias en 2011. Il n'est pas surprenant que cette année, la couverture de l'élection présidentielle porte sur un bon nombre de ces mêmes questions.
La rapport a également révélé que la couverture de la foi du candidat à la présidence Mitt Romney est toujours importante dans la presse écrite et audiovisuelle. Elle a des effets néfastes sur la discussion sur le mormonisme dans les forums publics tels que les blogs, avec des commentaires négatifs faisant état d'informations provenant des médias traditionnels selon lesquels la foi de Mitt Romney sera un élément important aux yeux de certains électeurs. Toutefois, de récents sondages indiquent que malgré des sentiments négatifs à l'égard des mormons, la majorité des électeurs ne pensent pas que la foi de Mitt Romney ait un rapport avec ses compétences en tant que candidat à la présidence. Les débats médiatico-politiques autour de certaines religions semblent justifier la «différenciation» de membres de certains groupes religieux dans la société. Les musulmans et les mormons, par exemple, ne sont souvent identifiés qu'à travers leur religion lorsqu'il y a un problème ou une controverse. Dans les médias, les débats politiques portant sur les «valeurs morales» sont d'habitude liées aux valeurs chrétiennes conservatrices. Cependant, l'islam et le mormonisme découlent de la tradition abrahamique et partagent beaucoup de ces valeurs, à l'instar d'autres religions. Pourtant, ces valeurs communes sont rarement mises en avant. Par ailleurs, les membres de ces religions ne constituent pas des blocs d'électeurs homogènes. Ainsi, ce qui est important pour un électeur musulman ne l'est pas forcément pour un autre.
Le plus grand défi pour les journalistes qui couvrent la religion et les élections est de bien comprendre toutes les religions des Américains afin de décrire avec nuance les problèmes liés à la foi. Au lieu de transformer les religions en éléments de division, l'accent devrait être mis sur le programme de chaque candidat. Et pour contrer la «différenciation» des religions minoritaires, il faudrait davantage parler des similarités qui existent entre les religions et des besoins sociaux des électeurs de confessions et origines différentes.
Surtout, ceux qui rendent compte des controverses politiques autour de la religion ont le pouvoir de décider du temps qu'elles demeureront dans les médias, de la place qui leur sera faite, des personnes qui y prêteront attention et du contexte qui les entourera. Ce pouvoir devrait être utilisé de manière responsable.
Nadia S. Mohammad
Rédactrice adjointe d'AltMuslimah.com.