De la liberté d’insulter
Le caractère provocateur et irresponsable de la publication par Charlie Hebdo de caricatures du Prophète, insultantes pour les musulmans, est indéniable et la condamnation de cet acte a été, à juste titre, unanime. D’autant plus que la motivation commerciale est évidente : parue hier (mercredi), l’édition de l’hebdomadaire satirique français n’est pas restée longtemps dans les kiosques, elle a été rapidement épuisée, en quelques heures, et un nouveau tirage est prévu pour vendredi. Le succès commercial est acquis même si on dit qu’un grand nombre d’exemplaires ont été achetés pour être détruits. Il est difficile de croire que Charlie Hebdo n’a pas calculé son coup. Les caricatures ont été diffusées à un moment où l’actualité mondiale était dominée par les réactions au film anti-islam et le lectorat facile à capter. Pour se justifier, les dessinateurs de Charlie Hebdo invoquent leur liberté d’expression, n’admettant aucune ligne rouge à leur métier. Certes, dans la presse, la caricature comme le billet ou la chronique sont des genres d’expression bien particuliers pour lesquels les limites à la liberté sont souvent d’une élasticité imprévisible, atteignant dans ce cas le stade de l’inadmissible. Même l’esprit de responsabilité, particulièrement aiguisé, de ce point de vue, dans le contexte actuel, n’a pu empêcher l’abus dont ont fait preuve les dessinateurs de Charlie Hebdo. Car provoquer des troubles dans le monde fait-il partie de la liberté d'expression ou est-ce plutôt une menace pour celle-ci ? Fait significatif : personne, parmi les autorités françaises, n'a osé interdire à Charlie Hebdo, porteur d’insultes aux musulmans, d’être dans les kiosques, de peur d'assumer la lourde responsabilité de mettre un terme à une dérive pourtant criante.
Ramdane Ouahdi
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