Photos de la guerre de Libération : Ouahab Hebbat dénonce l’hypocrisie
Colère. Déception. Les mots ne sont pas assez forts pour décrire l’état d’esprit dans lequel se trouve le directeur de Médias Club et de l’agence photo New Press, Ouahab Hebbat. La gigantesque exposition de photographies de la guerre d’Algérie qu’il devait lancer demain, pour célébrer le cinquantenaire de l’Indépendance, a été reportée. «Finalement, l’indépendance nationale n’intéresse les institutions et les entreprises commerciales que quand elle est synonyme de profit et d’intérêt», fulmine celui qui, dans les années 90, a pris son bâton de pèlerin et traversé les capitales européennes et nord-américaines pour y montrer le vrai visage de l’hydre intégriste et son corollaire le terrorisme abject. «Au premier abord, à chaque fois, les responsables m’accueillent avec de grands encouragements, mais dès que je sors de leurs bureaux, on éteint les portables et plus aucun contact n’est possible», regrette Ouahab Hebbat, dont le projet, pourtant, est à but non lucratif. «Tout ce que je cherche, ce sont des sponsors qui prennent en charge le tirage de grandes affiches de photos inédites de notre glorieuse Révolution.» Mais cette démarche qui ne semble pas requérir de grosses sommes peine à aboutir. «Même le ministère des Moudjahidine me ferme la porte au nez», dénonce le directeur de New Press. Faut-il rappeler, à ce sujet, que le département de Chérif Abbas a consacré un lourd budget pour l’édition et la réédition de livres se rapportant à la guerre de Libération et que cette initiative, qui s’inscrit pleinement dans cette optique, ouvre droit au même financement que pour les maisons d’édition «qui se frottent les mains pour les marchés juteux qu’elles obtiennent grâce aux nombreuses festivités parrainées par la Présidence et les ministères de la Culture et des Moudjahidine notamment», maugrée Ouahab Hebbat qui dit ne pas comprendre, non plus, pourquoi les entreprises commerciales étrangères, bien que de droit algérien, refusent de mettre la main à la poche pour soutenir l’initiative qui permettra à des milliers d’Algériens de découvrir des images jusque-là jamais vues sur leur lutte armée. Médias Club a été contraint de reporter l’exposition au 1er novembre prochain, en espérant que, cette fois-ci, son projet trouve une oreille attentive et, surtout, patriote et jalouse de l’indépendance de l’Algérie : «Notre indépendance nationale, acquise au prix de lourds sacrifices, ne se fête-t-elle que lorsqu’il y a des bénéfices derrière ?» s’indigne Ouahab Hebbat, le cœur plein. Il prévoit une conférence de presse pour dénoncer ce qu’il qualifie d’«hypocrisie» et de «manque d’engagement flagrant» envers la patrie.
Sarah L.
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