Les milliards du ministre
Il est devenu courant, depuis quelque temps, d’entendre parler et même de prendre connaissance, directement dans les médias, de transactions immobilières engageant des milliards, voire des dizaines de milliards. Le plus choquant est de trouver au centre de ces transactions des personnalités qui occupent des postes importants au sein des appareils de l’Etat. La chose est maintenant tellement fréquente qu’elle a tendance à se banaliser dans la population qui finit par trouver «normal» l’enrichissement rapide de responsables de l’Etat, à divers niveaux, qui ont la chance de se trouver dans une niche rentière providentielle, sous forme légalisée (rémunérations exagérément élevées et souvent illégitimes, par rapport au reste des travailleurs) ou illégale (carrément la corruption). Le phénomène s’étend d’ailleurs à toute la classe politique et assimilée, logée au Club des Pins avec dépenses zéro, toutes prises en charge par l’Etat. On apprend que des anciens ministres et cadres supérieurs qui ne sont plus en fonction ont été mis en demeure de quitter les villas de la résidence d'Etat. Beaucoup cherchent à acheter des villas cossues dans les quartiers huppés d'Alger. Ils ont visiblement les moyens de se payer de telles habitations de luxe. Les gens ordinaires (y compris les simples agents de l’Etat) savent tout cela, ils observent et quand ils constatent un brusque changement dans la situation financière et sociale d’une personnalité politique ou d’un fonctionnaire, ils ne s’interrogent plus sur l’origine de ce miracle. C’est sans doute dans cette réaction que se situe l’explication de la désaffection grandissante d’une bonne partie de la population à l’égard de l’Etat comme le prouvent la faible participation aux élections et les maintes manifestations d’incivisme dans la vie quotidienne. Abdelmalek Sellal, Premier ministre d’un gouvernement dont fait partie le salarié de l'Etat Abdallah Ghoulamallah, qui vient de se faire subtiliser 3 milliards destinés à l’achat d’une villa pour sa fille, a placé la lutte contre la corruption au rang des priorités de son gouvernement. Elle doit être intégrée dans toute l’architecture sociale du pays, qu’il faut revoir pour la rendre plus juste.
Lazhar Houari
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