Les dernières consignes de Chadli Bendjedid avant sa démission
La décision de l’ancien président Chadli Bendjedid de se retirer était mûrement réfléchie, à en croire les témoignages de plusieurs personnalités qui ont joué les premiers rôles dans l’arrêt du processus électoral en janvier 1992. Les responsables qui ont eu à côtoyer le défunt confirment que ce dernier n’était pas du genre à céder à la pression. Ils en veulent pour preuve son maintien à la tête du pays après le «séisme» social d’octobre 1988. Beaucoup a été dit et écrit sur cet épisode crucial de la vie politique nationale. Certains continuent de croire que Chadli avait été poussé vers la porte de sortie, tandis que d’autres, plus au fait des tractations qui avaient lieu parallèlement à la grave crise provoquée par les extrémistes du FIS, corrigent cette «erreur historique» et soutiennent que le président de l’époque avait pris lui-même la décision ferme et irrévocable de mettre les destinées du pays – en ébullition – entre les mains de l’institution la plus à même de sauver le pays d’une dérive programmée, c’est-à-dire l’Armée. A ce jour, des politiciens et des analystes de la scène politique nationale persistent à dire que Chadli a été déposé, bien que le concerné lui-même n’eût de cesse de démentir cette allégation à chaque fois que l’occasion lui en fut donnée. Avant de rendre publique sa démission, Chadli Bendjedid convoqua, dans son bureau, son ministre de la Défense et ancien compagnon d’armes à la Base de l’Est, le général Khaled Nezzar. Chadli parut extrêmement bouleversé par la tournure prise par les événements. Le pays était au bord du chaos. Le Parlement venait de clôturer sa mandature, le chef du gouvernement, qui avait échoué lamentablement dans la gestion de la crise, avait été démis de ses fonctions. Seule restait l’armée pour rétablir l’ordre. C’est dans ces circonstances délicates que Chadli Bendjedid s’est adressé au ministre de la Défense en ces termes : «C’est encore une fois à l’Armée d’intervenir.» Et d’enchaîner : «Je vous demande de veiller à l’unité nationale et de protéger ma famille.» Ainsi, Chadli craignait plus pour le pays et ses proches que pour lui-même. Une attitude noble que le général Khaled Nezzar n’a pas manqué de consigner dans ses mémoires.
Lina S.
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