L’Algérie à l’épreuve du pouvoir : le général Nezzar écrit à Bourges
Le documentaire d’Hervé Bourges, L'Algérie à l'épreuve du pouvoir, réalisé par Jérôme Sesquin et diffusé par la chaîne de télévision française France 5 est passé à côté de la plaque. Vieil ami de l’Algérie, il était attendu d’Hervé Bourges qu’il se détachât des stéréotypes véhiculés sur l’Algérie par les médias et les hommes politiques français. Bourges, qui a de tout temps milité pour l’indépendance et fut un proche collaborateur de Ben Bella en 1962, a-t-il manqué de discernement, a-t-il subi quelque influence pour ramener le contenu de son film au «Qui tue qui ?», cette formule funeste qui avait été mise au point par les islamo-socialistes pour fragiliser l’armée et permettre une intervention étrangère sous une forme ou une autre ou a-t-il, l’âge et la maladie aidant, laissé faire son réalisateur sans demander à revoir la copie avant sa diffusion ? Le documentaire, que Bourges a réalisé en Algérie durant l’été 2012, se voulait «une enquête politique et historique au cœur du pouvoir algérien, des accords d’Evian de 1962 au printemps arabe de 2011, à la rencontre d’une Algérie à l’épreuve du pouvoir, avec la participation des acteurs de l’époque et les principaux hommes politiques algériens, ainsi que des personnes de la société civile», lit-on dans la présentation du film. Mais à la vue du documentaire, il s’avère que celui-ci est truffé d’insinuations, d’images subliminales qui renvoient le téléspectateur algérien à des déductions plus qu’elles ne l’éclairent sur son histoire ancienne et récente. Cette façon de monter et de commenter les événements traités dans le documentaire fait grincer des dents de ce côté-ci de la Méditerranée. Le général Khaled Nezzar, qui a été interviewé par l'équipe d'Hervé Bourges pendant quatre heures et dont seuls quelques très courts extraits ont été repris, en dépit du rôle central qu’il a joué durant cette période, a fait part de son étonnement quant à la façon dont les faits ont été présentés. «En visionnant la deuxième partie de votre documentaire l'Algérie à l'épreuve du pouvoir, j'ai été surpris de voir que vous y avez intégré la séquence traitant de mon interpellation au cimetière d'El-Alia. Par simple correction, il eût été nécessaire de me demander mon accord, d'autant qu'à travers mon engagement écrit, il était question de ne reproduire que mon image et mes propos normalement inclus dans les quatre heures d'enregistrement», s’est indigné l’ancien ministre de la Défense dont les propos ont été intercalés dans le documentaire et suivis d’images et de commentaires, de sorte à laisser entendre que l’armée est derrière l’assassinat de Boudiaf, les massacres des civils au milieu des années 1990, le départ de feu Chadli Bendjedid en 1992, la création du GIA et plusieurs autres allégations soutenues par des félons et des islamistes proches du FIS. En passant les images de l’opération d’El-Alia, montée par le centre CANVAS(*) – créé par la CIA –, en «actionnant» un jeune militant qui avait été aperçu la veille à l’ambassade des Etats-Unis à Alger, Bourges a reproduit la fausse image, fabriquée par le FIS et ses appendices, d’une armée de massacreurs et mis les véritables criminels dans la peau de la victime. «Je considère que ce passage donne une toute autre interprétation à votre documentaire», a dénoncé le général Nezzar, dans un courrier adressé à Hervé Bourges.
M. Aït Amara
(*) https://www.algeriepatriotique.com/article/y-t-il-un-lien-entre-laction-del-alia-contre-nezzar-et-le-canvas
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