Essebsi : «Ghannouchi a soutenu le FIS en Algérie car il est pro-salafistes»
L'ancien Premier ministre tunisien, Beji Caïd Essebsi, charge le gouvernement Ennahda, qui selon lui, travaille pour un «autre agenda» que celui «du peuple tunisien». En plus clair, le président du mouvement laïc L’appel de la Tunisie accuse ce gouvernement islamiste de «manœuvrer» pour s’emparer de tous les pouvoirs et instaurer sa «tyrannie». Dans une interview parue aujourd’hui dans le quotidien arabophone El Khabar, Caïd Essebsi a accablé Rached Ghanonuchi qui se présente, d’après lui, sous de faux habits d’un homme de «dialogue». Selon lui, derrière ce «visage» de modéré se cache un véritable homme de pouvoir qui n’a jamais avoué ses véritables desseins. «Ennahda cherche à s’emparer totalement du pouvoir en sourdine, procédant à des nominations de ses hommes à des postes clés et stratégiques. La déclaration de Ghannouchi qui estimait que l’armée et la police n’étaient pas dignes de confiance en dit long sur l’état d’esprit qui règne au sein de cette formation obnubilée par le pouvoir. Ennahda vise ainsi par tous les moyens la prise de contrôle de tous les leviers du pouvoir, notamment lors des prochaines élections», prévient cet ancien Premier ministre que le président d’Ennahda avait qualifié d’«homme dangereux» qui veut recycler les cadres de l’ancien parti au pouvoir. Fin connaisseur de la Tunisie et de sa classe politique, Caïd Essebsi ira jusqu’à affirmer que le mouvement salafiste tunisien n’est rien d’autre qu’un prolongement du parti Ennahda. Ghannouchi dit que les salafistes sont nos enfants, ils ne sont pas venus de Mars. Lui-même était salafiste», relève-t-il, reconnaissant que les Tunisiens sont «tombés» dans le piège qui leur a été tendu par Ennahda qui a su vendre son «image» de parti modéré. «Nous avons cru que ce parti et Ghannounchi étaient de véritables modérés. Et nous nous sommes trompés. Quand ils ont pris le pouvoir, ils ont montré leur vrai visage. Aujourd’hui, il y a des rapports spéciaux entre Ennahda et les salafistes. J’irai jusqu’à dire qu’Ennahda a même encouragé les salafistes», souligne-t-il encore, non sans regret. « Ghannouchi a regretté l’arrêt du processus électoral en 1992 (en Algérie) parce qu’il était proche des salafistes algériens (le FIS dissous, ndlr)», poursuit-il. Caïd Essebsi a, cependant, écarté la reproduction du scénario algérien en Tunisie, car, estime-t-il, les Tunisiens refusent de retourner à l’âge de la pierre. Le président du mouvement L’appel de la Tunisie considère que la situation en Tunisie est particulière et ne ressemble à aucun autre pays. D’après lui, il n’y a pas eu de «printemps arabe». Ce qui s’est passé en Tunisie ne peut pas être exporté. C’est une expérience propre à ce pays. «Cela pour la simple raison que la révolution tunisienne a été provoquée et menée par des jeunes qui ne sont sous aucune influence idéologique ou politique, ni sous un leadership ou à la solde d’une force étrangère», atteste-t-il. Il considère néanmoins qu'Ennahda et Ghannouchi doivent être surveillés de près pour éviter tout dévoiement de la révolution.
Sonia B.
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