L’amertume du perdant
Au pays de la libre entreprise par excellence que sont les Etats-Unis, les entraves ne manquent pas de déguisements pour éliminer les concurrents étrangers. La Chine en a fait l’expérience à ses dépens. Les autorités américaines n’y sont pas allées avec le dos de la cuillère pour écarter du marché deux sociétés chinoises de télécommunications, Huawei et ZTE. Elles les ont tout bonnement accusées de constituer une menace pour la sécurité nationale des Etats-Unis. C’est peu dire que le climat des affaires est plutôt suspicieux dans ce pays censé fonctionner selon les règles du marché et de la libre concurrence. Il suffit que deux géants chinois du secteur des technologies des télécommunications montrent le bout du nez pour que le climat des affaires oublie ses «fondamentaux» pour quitter le terrain commercial et passer à celui de la politique. Résultat : le congrès américain a pondu un rapport qui recommande que les systèmes informatiques du gouvernement et des entreprises privées excluent tout équipement provenant de ces deux entreprises, et demande au Comité sur les investissements étrangers de bloquer toute acquisition, rachat ou fusion impliquant les deux sociétés. L’accusation rocambolesque et se voulant sensationnelle d’espionnage est suffisante pour exclure n’importe quelle société étrangère implantée aux Etats-Unis. Dans la course vers la Maison Blanche, la surenchère antichinoise est un bon argument électoral pour les deux candidats, républicain et démocrate, qui s’accusent mutuellement de laxisme face aux investisseurs venus de Chine. Aux critères commercial et technique dans les relations d’affaires, les Américains viennent d’en ajouter un troisième, inattendu, la sécurité nationale.
Lazhar Houari