Un conseiller de Poutine explique pourquoi l’Algérie n’a pas été déstabilisée
Dans un entretien accordé à notre confrère arabophone Al Fadjr, Léonid Issaïev, écrivain et conseiller du président Vladimir Poutine, reconnaît que la Russie a perdu sa relation privilégiée avec l’Algérie même si dans certains domaines, comme celui de l’armement, la coopération est toujours bonne. Il estime que l'Algérie et les pays arabes ont beaucoup reçu de l'ex-Union soviétique et si les relations ont reculé avec la Russie, la responsabilité est partagée, dit-il. A son avis, l’ambassade de Russie à Alger y est pour quelque chose, elle doit faire plus et travailler à jeter les bases du renforcement des relations entre les deux pays. Si elle ne le fait pas suffisamment, c’est, selon lui, à cause de la crainte que l’Algérie retombe dans les événements des années 1990. Mais d’une façon générale, il note qu’après l'effondrement de l'Union soviétique, la Russie est sortie du marché arabe. Le président Boris Eltsine n’y pensait plus. Aujourd’hui, constate Léonid Issaïev, la Russie ne concurrence ni l'Occident ni la Chine sur le marché arabe, elle joue le deuxième et même troisième rôle dans la région arabe. A propos du « printemps arabe », il est convaincu que l’Algérie n’est pas dans la même situation que les pays arabes concernés par ces événements. Il est difficile, dit-il, d’imposer de l’extérieur une quelconque action à mener en Algérie. Il n’y a pas de financement étranger accordé aux ONG algériennes qui pourraient intervenir. En outre, ajoute-t-il, les Algériens ne veulent pas revivre ce qu’ils ont enduré dans les années 1990. Autre différence de taille mise en évidence par Léonid Issaïev : en Égypte et en Libye , Moubarak et Kadhafi essayaient de transférer le pouvoir à leurs enfants, ce qui est contraire au système républicain de ces pays alors que dans les monarchies c’est permis, ce qui explique, dit-il, la survie des monarchies. Il fait remarquer que ce modèle d'héritage du pouvoir n’existe pas en Algérie. Revenant au «printemps arabe», il ne trouve pas surprenant que l’Occident ait participé à la chute de régimes qui lui étaient proches. Il rappelle que du temps de l’Union soviétique, l’Irak de Sadam Hussein était proche des Etats-Unis et cela n’a pas empêché les Américains de l’enlever du pouvoir. Idem pour l’Iran en 1979. Il pense même que cela pourrait se reproduire, dans le futur, avec les gouvernements issus du printemps arabe. Léonid Issaïev ne pense pas que les dirigeants arabes soient responsables de la situation qui a mené au «printemps arabe». Il explique que ces pays ont accédé à l'indépendance depuis une courte période et il faut, dit-il, un demi-siècle pour parvenir à l'autonomie, si l'on prend en référence le cheminement des pays occidentaux. A propos du Qatar, il confirme que ce pays ne représente rien pour les Russes qui le considèrent comme agissant pour le compte des intérêts de l'Arabie Saoudite. Sur la situation en Syrie, enfin, Léonid Issaïev est très pessimiste et estime que ce pays entrera inévitablement dans une guerre totale avec un financement et des armes provenant de l'étranger. Selon lui, l'Otan n'interviendra pas directement en Syrie mais agira pour faire renverser le régime de l'intérieur par des mercenaires.
R. I.
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