Aveuglé par le pouvoir ?
La tentation de prendre son rêve pour la réalité en minimisant le danger islamiste en Algérie a joué bien des tours aux démocrates avec, dans la pire des évolutions, le drame qu’a connu notre pays dans les années 1990. Personne, parmi les Algériens qui en ont été les victimes de façon massive, ne peut oublier cette période. On comprend mal la hâte du leader du MPA, Amara Benyounès, à enterrer l’islamisme. Homme politique aux convictions démocratiques et modernistes indéniables, il est censé être très vigilant sur les dangers qui menacent l’Algérie de ce côté. «Les partis islamistes ont échoué.» C’est aller vite en besogne, quand on sait que leurs représentants siègent au gouvernement, dont lui-même fait partie, et à des postes importants. Ils y sont, maintenant, depuis longtemps et rien n’indique qu’ils risquent de perdre cette position. Autre affirmation discutable : «Les Algériens à travers ces élections sont sortis de la période islamiste.» Il y a là une sous-estimation de l’abstention qui a été, pourtant, très lourde, c’est même le seul aspect de l’élection qui ne fait aucun doute. Les chiffres officiels – bien que sujets à caution à cause des pratiques électorales peu crédibles qui ont marqué l’histoire du pays – le montrent bien. Dans la capitale, trois électeurs sur quatre, c’est énorme, selon, faut-il insister, les chiffres officiels, ont boycotté les élections. Qui sont ces citoyens qui ont choisi de ne pas entrer dans le système électoral (ou d’en sortir) ? Enfin, le pas est vite est franchi : «Nous sommes dans une période de post-islamisme.» Heureusement, Ahmed Merani, ancien dirigeant du FIS, puis dissident et ensuite ministre éphémère, a encore une bonne mémoire. Il vient de rappeler comment les islamistes ont failli réussir à exploiter la situation d’après octobre 1988, alors qu’auparavant, en apparence, ils n’avaient pas d’influence sur la société et ne s’occupaient que de prédication. En apparence, comme aujourd’hui.
Cherif Brahmi
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