Un fondateur du FIS dissous : «Abassi Madani avait des objectifs occultes»
Ahmed Merani, un des membres fondateurs de l’ex-FIS, accuse Abassi Madani d’avoir été à l’origine de la radicalisation du parti. Dans une interview accordée au journal arabophone Echorouk, Ahmed Merani explique comment le premier responsable de ce parti dissous avait manœuvré pour imposer «sa ligne de conduite belliqueuse» contre l’avis de la majorité des membres du conseil consultatif. «La majorité des membres du conseil consultatif étaient contre ceux qui poussaient à l’agitation et à la violence. Ils étaient aussi contre les déclarations d’Abassi Madani et diamétralement opposés à la grève politique qui a conduit le pays à la catastrophe», atteste Ahmed Merani qui semble vouloir soulager sa conscience au crépuscule de sa vie. Ce membre fondateur ayant occupé de hautes responsabilités au sein du FIS dissous a durement critiqué l’égoïsme et l’individualisme d’Abassi Madani «qui n’en faisait qu’à sa tête», refusant à chaque fois de suivre les décisions du conseil consultatif du parti. «Le conseil consultatif se réunissait et décidait mais Abassi Madani imposait son propre point de vue et faisait l’exact contraire de ce que nous avions décidé», indique-t-il, qualifiant d’autoritaire l’attitude du chef de l’ex-FIS. Ahmed Merani argumente en citant des faits. «Je vous cite un exemple : quand le code électoral avait été promulgué et que le gouvernement Hamrouche avait tenté de le tailler sur mesure pour le FLN, nous avions eu un débat tendu au sein du conseil consultatif. Nous avions tous rejeté le texte, mais à différents degrés d’opposition. (…) Nous avions donc chargé Abdelkader Hechani de rédiger une déclaration de rejet et une demande de révision de ce texte. Mais nous avons découvert abasourdis qu’Abassi Madani avait animé une conférence de presse dans laquelle il avait totalement déformé le contenu de notre déclaration à laquelle il avait rajouté quatre points qui n’avaient jamais été discutés, dont l’exigence de la tenue d’élections présidentielles anticipées et des menaces de reprise de la grève politique si le gouvernement n’accédait pas à ses revendications.» Juste après, affirme-t-il, le conseil consultatif avait tenu une réunion urgente pour tenter de rectifier le tir. Selon Merani, les membres fondateurs du parti dissous se doutaient carrément du but recherché par Abassi Madani en adoptant un langage guerrier basé sur la manipulation et la menace. Ahmed Merani a assuré que le conseil consultatif avait pris la décision d’écarter Abassi Madani du staff dirigeant mais ce dernier, ayant senti le coup venir, avait appelé rapidement à une grève générale et fait sortir des centaines de milliers de militants dans la rue. Merani avoue ainsi qu’Abassi Madani était «un dictateur rusé» qui travaillait pour «des intérêts occultes», du moins autres que «la ligne directrice et fondamentale» du parti à sa création.
Sonia Baker
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