Egypte : le pouvoir actionne la justice pour verrouiller les libertés
En Egypte, les salafistes, forts de l’adoption par référendum du projet de Constitution présenté par leur allié frère musulman Morsi, n’ont pas attendu pour mettre à exécution leur projet visant à l’application de l’article 2 qui fait référence à la charia. Selon des informations données par la télévision égyptienne, une demande a été déposée devant le tribunal administratif du Caire pour exiger la fermeture des magasins de vente d'alcool et des boîtes de nuit. Cette action en justice est fondée, aux dires de ses auteurs, sur la Constitution et particulièrement l'article 2 qui stipule que «l'islam est la religion d'État et l'arabe est la langue officielle, et les principes de la charia islamique sont la source principale de la législation» ainsi que l'article 10 qui fixe à l'État et à la société l’obligation de «protéger la morale». Les craintes de voir les islamistes au pouvoir en Egypte compromettre la principale rentrée en devises du pays se confirment. Le secteur touristique ne supportera pas un durcissement des règles à l’encontre des touristes : mixité des plages, vente d'alcool… et risque d’aller vers le chômage technique. Jusqu’à maintenant, les touristes pouvaient trouver leurs boissons préférées dans les restaurants et hôtels comme à Louxor et autres établissements qui leur sont réservés. Ils pouvaient acheter des boissons alcoolisées ou de la bière dans les magasins sur présentation de leurs passeports. Les Egyptiens, pour leur part, n’étaient plus en mesure d’acheter des boissons alcoolisées au cours des grandes fêtes islamiques. En dehors de ces périodes, ils devaient se cacher pour boire leur bière. De grands pas avaient déjà été faits vers l’interdiction de l’alcool dans ce pays. Ainsi, il était interdit de longue date de vendre des boissons alcoolisées au cours du mois sacré du Ramadhan. Le ministre du Tourisme égyptien, Mounir Fakhry Abdel Nour, vient de confirmer que la vente d’alcool serait interdite pendant toutes les fêtes islamiques et pas seulement durant le mois de Ramadhan. Il a décidé de modifier les critères et les conditions des institutions touristiques (magasins, restaurants…) pour y augmenter le nombre de jours où il est interdit de servir des boissons alcooliques aux Égyptiens. Le commerçant qui contreviendra à ces directives se verra rayer du registre du ministère, selon la décision du ministre. L’Egypte vit actuellement une grave crise économique due au déficit budgétaire et aux dettes intérieures et extérieures croissantes. Le pays a besoin de 14,5 milliards de dollars pendant les prochains 20 mois pour surmonter cette crise. Les ressources financières du pays couvrent seulement 60% des dépenses qui augmentent rapidement, selon les responsables égyptiens qui évoquent l’éventualité de suspendre certaines subventions aux prix à la consommation. Les réserves de devises ont chuté de 35 milliards de dollars américains à 15 milliards au cours des deux années passées. La situation risque d’empirer, estiment les observateurs qui connaissent bien ce pays. Dans ce contexte de crise, les salafistes veulent également obtenir l’interdiction aux banques de pratiquer les intérêts dans les crédits.
Kamel Moulfi
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