Ces ministres qui abusent
En marge, pourrait-on dire, de l’épilogue de la crise du FLN intervenue hier avec le départ d’Abdelaziz Belkhadem du poste de secrétaire général, et tout à fait incidemment, journalistes et observateurs ont pu constater, avec un minimum de perspicacité, que le temps où le parti unique se confondait avec l’Etat, et les moyens de l’un avec ceux de l’autre, que l’on croyait fini, Constitution à l’appui, n’a pas disparu. La preuve : des ministres sont arrivés à l’hôtel Riadh où se tenait la session du comité central du FLN avec véhicule, chauffeur et gardes du corps mis à leur disposition par l’Etat (c'est-à-dire nous tous, y compris ceux qui ne sont «rien du tout»). Les moyens de l’Etat sont destinés à permettre aux ministres de faire face à leurs obligations en tant que membres du gouvernement et non pas pour être utilisés dans le cadre d’une activité partisane qui relève de la sphère privée. Dans ce registre, les membres du RND ne sont pas en reste. Ils ne dédaignent pas, eux non plus, «profiter» des menus avantages que leur procure la confusion parti-Etat qu’ils sont arrivés à entretenir pour le plus grand bénéfice de leur formation politique. Ils peuvent stationner, moyennant macaron au sigle du RND posé à l’intérieur du véhicule et visible à travers le pare-brise, là où les véhicules de «ceux qui ne sont rien» prennent un sabot et devront s’acquitter d’une lourde amende. Finalement pro-Ouyahia ou anti, anti-Belkhadem ou pro, ils sont interchangeables par la magie d’un système taillé sur mesure pour eux et eux seuls. Des «rendeurs de service», placés là où il faut dans les rouages administratifs, sont là pour mettre les moyens de l’Etat, parfois même la puissance de l’Etat, à leur disposition pour leur régler tous les problèmes. Bien sûr, par ricochets, plein de gens faisant partie de la nébuleuse clientéliste en orbite autour de ces partis en profitent, eux aussi. D’où cette réflexion, chaque fois que l’on se plaint que quelque chose ne marche pas dans notre pays : «Oui, mais tout le monde trouve son compte !». Ce qui est absolument faux.
Kamel Moulfi
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