Un prédicateur koweïtien veut voiler les petites filles tunisiennes
Le très controversé prédicateur koweïtien Nabil Al-Awadi provoque une véritable fitna au pays de la «révolution du Jasmin». Sa venue et ses prêches, ces jours-ci en Tunisie, suscitent une vive polémique entre les islamistes incarnés par le parti Ennahda et les laïcs qui se placent en défenseurs des acquis du peuple tunisien. Ces derniers y voient une «ingérence dangereuse dans les spécificités de la société» et appellent à interdire de tels «chouyoukh» d’entrer sur le territoire tunisien. Ils accusent principalement ce prédicateur de vouloir «semer» les «bonnes graines du wahhabisme» en terre tunisienne. Un travail d’endoctrinement qualifié de «destructeur» des valeurs séculaires de leur pays. Les partisans de la laïcité dénoncent dans ce sillage le laxisme complice du gouvernement islamiste tunisien qui ouvre grand la porte à tous les prédicateurs et salafistes les plus radicaux et les plus dangereux du monde arabe. Par leurs conférences dans les quartiers populaires, ces prédicateurs bouleversent la société tunisienne en faisant basculer une bonne partie dans l’extrémisme religieux qui se traduit souvent par des actes de violence inouïe et un rejet catégorique de la démocratie et de la modernité. Le premier membre du gouvernement pointé d’un doigt accusateur : Sihem Badi, ministre de la Femme et des Affaires familiales, qui refuse d’appliquer la moindre restriction sur la liberté d’opinion y compris pour ceux qui viennent de l’étranger. Pour elle, «leur refuser de tenir des conférences en Tunisie est une entrave à cette liberté longtemps confisquée par l’ancien régime». Les propos de la ministre ont suscité de vives critiques de la part de l’opposition démocrate et de la gauche républicaine. C’est le cas du secrétaire général du Parti des citoyens démocrates unis, Belaïd Choukri, qui assimile les conférences de Nabil Al-Awadi à du «poison» qui risque de détruire la société tunisienne, laquelle vit une «difficile période de transition démocratique». Il appelle le gouvernement à leur interdire de tenir le moindre prêche ou conférence sur le sol tunisien. Pour lui, il s’agit de «campagnes idéologiques» conçues et préparées pour «créer la fitna en Tunisie». D’autres voix s’élèvent contre le salafisme qui prend des proportions alarmantes en Tunisie. Un salafisme alimenté par les prédicateurs des pays du Golfe. C’est le cas du politologue Salah Eddine El-Djourchi. S’exprimant sur le site d’information Elaph, ce politologue considère les «campagnes» des salafistes étrangers comme une véritable menace pour les fondements de la République de Tunisie, qui est de nature laïque. Des avocats également s’insurgent contre la venue de ces prédicateurs qui «veulent renvoyer les Tunisiens à l’âge de la pierre». Ils affirment leur attachement à la laïcité de la Tunisie et condamnent «fermement» l’appel de Nabil Al-Awadi à la «hidjabisation» des filles mineures, un des thèmes phares de ses conférences que le gouvernement islamiste présente comme d’une grande valeur pédagogique et scientifique. Ce prédicateur koweïtien est de la même trempe que Aïd al-Qarni, Khaled Rachid ou encore cheikh Mohamed Ibn Abd Al-Wahab Al-Wasabi qui propagent dans le monde musulman leur vision étriquée du monde et de la vie. Pour une bonne partie de Tunisiens, ces «chouyoukh» constituent une menace pour la Tunisie qui s’enlise dans l’islamisme menant souvent vers le terrorisme religieux. L’inquiétude est grande tant l’avenir de ce pays est toujours dans l’incertitude.
Sonia B.
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