Comment le Qatar réactive les réseaux du FIS à travers des associations établies en Suisse
Des Qataris siègent dans les conseils d’administration de plusieurs organisations islamistes algériennes basées en Suisse, a-t-on appris d’une source informée. Ces organisations sont Rachad dont le président n’est autre que Mourad Dhina, membre actif du FIS dissous, Cordoue dirigée par Ahmed Zaoui, ancien numéro trois du même parti islamiste, et Al-Karama dont le principal responsable est Rachid Mesli, avocat proche des islamistes. A ces associations islamistes, s’ajoute le site électronique «hoggar.org». Des Qataris, proches de la famille régnante, sont présents dans les conseils d’administration de ces organisations en tant que bailleurs de fonds. Ils président les réunions et fixent les objectifs à atteindre. Les Qataris participent aussi en partie au financement de certaines ONG, telles que Trial, basée en Suisse également, et prennent en charge les honoraires des avocats engagés par cette ONG pour assister les terroristes installés en Suisse. Ces organisations qui activent à l’étranger ont un point commun : elles ont toutes été créées par des anciens du FIS dissous. Le principal organisateur de ces financements est Mourad Dhina, membre fondateur du mouvement Rachad, selon des informations sûres. Dhina est installé en Suisse depuis 1993, après avoir fui la France. Il fut porte-parole du tristement célèbre comité de coordination du FIS dissous. D’octobre 2002 à octobre 2004, il fut chef du bureau exécutif du FIS dissous à l’étranger avant de quitter le parti. Il est toujours recherché par les services de sécurité algériens pour trafic d’armes et d’explosifs, à destination des groupes terroristes MIA, GIA et Fida. Physicien de formation, Mourad Dhina s’est adonné à la confection de systèmes d’allumage d’engins explosifs destinés aux voitures piégées, chez lui à Genève. Il procédait également à des essais de fabrication d’explosifs sur son lieu de travail au vu et au su des services de sécurité suisses. Ce terroriste procédait, grâce aux recettes et aux contributions financières collectées dans le cadre de la vente de publications à caractère subversif au niveau des mosquées des grandes villes suisses et auprès de sympathisants de la mouvance islamiste d’origine algérienne arabe ou musulmane établis dans ce pays, à l’acquisition d’armes et autres matériels destinés aux groupes terroristes en Algérie. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si Mourad Dhina a été accusé par l’ancien ministre français Charles Pasqua d’entretenir des liens avec des marchands d’armes. Une accusation qui l’a contraint de quitter précipitamment Saint-Genis-Pouilly, dans l’Ain, en France, pour se réfugier à Meyrin, en Suisse, en 1993. Il a été condamné par contumace à 20 ans de réclusion criminelle par la justice algérienne.
Une longue liste d’assassinats au «palmarès» de Dhina
Ce responsable islamiste très actif dans les réseaux du FIS dissous à l’étranger a revendiqué l’assassinat de nombreux intellectuels algériens. Plusieurs années après avoir quitté l’Algérie, Dhina justifie ces assassinats par le choix de ces intellectuels d’«une voie de confrontation, une voie de provocation d’une jeunesse, et qu’ils ont payé ce prix». «Que ces intellectuels de gauche aient le courage d’assumer leur action, qu’ils disent nous nous sommes engagés dans une guerre et que certains d’entre nous l’ont payé de leur vie. Qu’ils en fassent des martyrs pour eux», a-t-il déclaré dans le documentaire de Séverine Labat et Malik Aït Aoudia, Algérie 1988-2000, autopsie d'une tragédie. Ainsi, la prise de position politique était tout simplement assimilée par les intégristes et leurs défenseurs politico-médiatiques à l’engagement militaire dans une guerre. Les islamistes, à travers leur organisation particulière à implantation urbaine appelée le Front islamique du djihad armé (Fida), procédaient à une forme d’extermination des intellectuels, établissant de longues listes de personnes à abattre. Journalistes, sociologues, psychologues, écrivains, politiciens, syndicalistes, cadres, artistes, enseignants. Ils semaient la mort partout. Ils tuaient des gens qu’ils ne connaissent même pas parce que des commanditaires à l’instar de Dhina les avaient mis sur la liste des soutiens au Taghout. Parmi leurs nombreuses victimes, il y a Hafid Sanhadri, cadre du ministère de l’emploi tué par balles près de chez lui le 14 mars 1993. Il y a aussi le sociologue Djilali Lyabès, ancien ministre sous le président Boudiaf tué le 16 mars 1993, Laâdi Flici, pédiatre, assassiné le 17 mars, Tahar Djaout, écrivain aux positions claires contre l’intégrisme froidement tué le 26 mai, Mahfoud Boucebsi, figure emblématique de la psychiatrie algérienne et farouche opposant à l’islamisme tué le 15 juin, M'hamed Boukhobza égorgé chez lui à Télemly le 22 juin. La liste des victimes est très longue. Le Fida a poursuivi les assassinats des intellectuels et des artistes jusqu’en 1998. Son fondateur est aujourd’hui confortablement installé en Suisse.
Sonia Baker
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