Prêcheurs autoproclamés
Le sympathique imam de la sainte mosquée d’El-Qods, Cheikh Salah-Eddine, a certainement trouvé les arguments justes et très pointus pour tourner au ridicule toute les théories «subversives» d’Ali Benhadj (voir article et vidéo), en soutenant qu’aucun texte coranique ou hadith n’approuvent explicitement l’impératif pour les oulémas d’appeler à la révolte contre un «gouvernement despotique», et considère ceux qui, parmi les oulémas, prônent le mot d’ordre de dissidence, comme de purs kharidjites, c’est-à-dire des incorrigibles. Mais il faut bien relativiser ici, car l’histoire de l’islam est truffée d’exemples d’esprits et de sectes libres et pacifistes qui ont choisi de manifester leur refus de cautionner un régime en place, jugé trop autoritaire ou injuste, on peut citer les mutazilite, les ahl el-kalam, les acharite, des sommités intellectuelles comme Ibn Rochd, Ibn Arabi… Loin de suivre une doctrine mortifère, ceux-là ont donné naissance à des siècles de Lumières de l’islam, les seuls. Historiquement, les kharijites ont joué un rôle politique important dans l’essor de l’islam modéré. Nous avons même en Algérie une communauté dite kharijite (les ibadites), qui a tout d’une communauté pacifiste et qui s’est toujours dressée contre le fanatisme religieux. Laisser aujourd’hui le monopole de l’opposition politique, idéologique ou tout simplement exégétique à la catégorie la plus décadente de la pensée islamique (qu’incarnent des prêcheurs autoproclamés comme Ali Benhadj ou Youcef Al-Qardhaoui) est une grave erreur. Les Palestiniens l’ont payée, en cédant le discours révolutionnaire aux islamistes du Hamas, et tous les peuples arabes en payent aujourd’hui les conséquences en laissant les mouvements fondamentalistes exprimer leurs vœux de contestation et de changement. Il faut leur ôter cette légitimité. Comment ? Voilà toute la question.
R. Mahmoudi
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