Affaire Haboul-Conseil d’Etat : les magistrats accusés «n’ont pas commis de faute professionnelle»
Les cinq magistrats du Conseil d'Etat (CE) accusés de fraude par l'ancien magistrat, Abdellah Haboul, «n'ont commis aucune faute, ni professionnelle ni autre», a affirmé la présidente du Conseil, Fella Henni, à l'agence officielle APS. «Les cinq magistrats du conseil d'Etat n'ont fait qu'appliquer une jurisprudence qui s'impose à eux parce que dégagée par un arrêt des chambres réunies du Conseil d'Etat, et n’ont commis aucune faute professionnelle», a souligné Mme Henni. Elle a estimé que l'action introduite par Haboul contre les cinq magistrats est «un cas unique et procède d'une méchanceté gratuite et d'une intention de nuire caractérisée», parce que l'auteur de cette action, qui a exercé comme magistrat et qui est actuellement avocat, «ne peut pas ignorer les dispositions de l'article 149 de la Constitution, la loi suprême du pays», a-t-elle expliqué. L’article 149 de la Constitution stipule que «le magistrat est responsable devant le Conseil supérieur de la magistrature et dans les formes prescrites par la loi de la manière dont il s'acquitte de sa mission». Sur cette base, elle a expliqué qu'«aucun magistrat ne saurait être attrait devant une quelconque juridiction de l'ordre judiciaire ou administratif pour rendre compte de la façon dont il s'acquitte de sa mission». La chambre civile près la cour d'Alger avait confirmé, le 7 mars 2013, le jugement rendu par le tribunal de Bir Mourad Raïs le 31 octobre 2011. Ce dernier avait rejeté l'action et déclaré ne pas avoir le pouvoir de discuter un arrêt du Conseil d'Etat. Haboul, qui a déclaré à la presse qu'il allait introduire un pourvoi en cassation devant la Cour suprême, accuse les 5 magistrats de fraude et dol dans les jugements rendus à son encontre. L'affaire remonte à 2005, lorsque Haboul a été déféré devant le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) «pour faute professionnelle». Le CSM, siégeant en matière disciplinaire, a décidé sa mutation d'office comme sanction. Haboul avait demandé l'annulation de cette décision devant le Conseil d'Etat. Le ministère de la Justice avait répliqué que les décisions du CSM ne sont pas susceptibles d'un recours en annulation, mais plutôt d'un recours en cassation, conformément à l'arrêt rendu par les chambres réunis du Conseil d'Etat en date du 7 juin 2005 sous le numéro 16886, dont Haboul nie l'existence. L'arrêt en question, dont l’APS détient une copie, figure à la page 57 de la revue du CE numéro 9 publié en 2009 et le numéro 10 de la même revue, page 59 et suivantes où il a été publié entièrement suivi d'un commentaire. Cette jurisprudence considère que les décisions du CSM dans sa composante disciplinaire sont des décisions judiciaires et non administratives, et sont en cette qualité susceptibles de pourvoi en cassation et non en annulation. Dans le cadre d'un recours en annulation, le Conseil d'Etat réexamine l'affaire en la forme et au fonds, tandis qu'en cas de pourvoi en cassation, le magistrat n'examine que l'aspect droit, soit, le respect de la loi. La présidente du CE a estimé que l'action de Haboul «était irrecevable à la base» et que «les juges qui ont eu à en connaître ne pouvaient que la déclarer en tant que telle, puisque seul le CSM dans sa composition disciplinaire est habilité à juger un magistrat de la manière dont il s'acquitte de sa mission», a-t-elle encore expliqué. Mme Henni a regretté «le tapage» fait par certains titres de la presse autour du «feuilleton Haboul-Conseil d'Etat» et les articles «tendancieux» où cinq magistrats de l'institution qu'elle préside ont fait l'objet de «diffamation et d'accusations de toutes sortes». Elle a également regretté qu’«ils aient été cités nommément au moins une fois par semaine et qualifiés de prévenus alors que dans les affaires criminelles, ces mêmes titres se contentent des initiales du mis en cause». La présidente a encore déploré que «tout le monde profite de l'obligation de réserve qui pèse sur les magistrats pour raconter n'importe quoi sur eux et sur leur façon de travailler».
R. N.