Libération des otages français enlevés au Cameroun : faut-il croire la version officielle de la France ?
Les sept otages français du groupe islamiste nigérian Boko Haram ont été libérés et rendus «sains et saufs» aux autorités camerounaises. C’est le président camerounais Paul Biya qui a annoncé cette bonne nouvelle notamment pour les familles des otages. Leur libération, a précisé Biya, a eu lieu dans la nuit de jeudi à vendredi. Le président François Hollande a affirmé aujourd’hui, en réaction à ce dénouement heureux de cette prise d’otages au Cameroun, que la France n’a pas versé de rançon pour obtenir la libération de ses ressortissants. «La France ne cède pas sur les principes, le non-versement de rançons», a déclaré le président français à la presse, alors que la France compte encore au moins sept de ses ressortissants otages en Afrique. Si, comme l’affirme François Hollande, la France n’a pas versé de rançon, qu’a-t-elle concédé en contrepartie pour la libération de ses otages ? Comment a-t-elle pu réussir une telle prouesse sans verser ni argent ni sang ? Les ravisseurs, faut-il le rappeler, exigeaient pour libérer ces sept membres d’une même famille, enlevés le 19 février dernier, la libération de membres de leur groupe, prisonniers au Nigeria et au Cameroun. La France et ses alliés camerounais ont-ils satisfait à l’exigence de ces terroristes ? «C'est en étant le plus discrets possible que nous pouvons être les plus efficaces», a souligné Hollande, affirmant qu’il ne pouvait pas «tout dire», mais l’Etat français «ferait tout» pour libérer ses otages là où ils se trouvent. Mais qu’a donc fait l’Etat français que le président Hollande ne peut pas révéler à l’opinion publique ? Affirmer que les ravisseurs ont libéré les otages sans aucune contrepartie serait une façon de dire qu’il pourrait exister de bons et de mauvais terroristes. Si Paris n’a rien payé en contrepartie, il est alors de son devoir d’expliquer aux autorités algériennes comment cela a été possible pour permettre la libération des diplomates algériens retenus au Mali depuis plus d’un an, sans avoir à renier le principe fondamental de ne jamais céder au vil chantage des terroristes. Une autre question nous brûle les lèvres : pourquoi les otages enlevés au Cameroun ont-ils pu être libérés et pas les autres toujours retenus par les mêmes terroristes ailleurs ? La France aura du mal à faire avaler la pilule d’autant qu’elle n’en est pas à sa première incartade dans la gestion du dossier des enlèvements. Selon les affirmations d’une ancienne ambassadrice des Etats-Unis à Bamako, la France aurait versé 17 millions de dollars pour la libération de quatre otages français enlevés au Niger en 2010. A la mi-2012, le président français Nicolas Sarkozy avait affirmé, à propos de deux otages en Afghanistan, que payer des rançons n'était pas un problème pour son gouvernement. Si la France l’a fait en 2010 sous Sarkozy, pourquoi ne le ferait-elle pas aujourd’hui sous un Hollande qui cherche à booster sa cote de popularité qui se trouve au plus bas niveau jamais enregistré sous la Ve République ?
Fahim Amraoui
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