Les députés ont honte
«Il n’y a pas de fumée sans feu», dit-on lorsqu’une rumeur circule avec insistance. Il en est ainsi de l’histoire de l’augmentation des salaires des députés. Le démenti lui-même a, paradoxalement, attisé le feu pour accréditer l’idée que, finalement, le rêve d’un député algérien est d’avoir à se prononcer, au cours de son mandat, sur une révision constitutionnelle. Il y a eu un précédent qui a fait ressortir la coïncidence entre le vote pour une nouvelle Constitution et l’augmentation du salaire du député. Le plus crédule d’entre les Algériens n’avait pas manqué de faire un lien de cause à effet entre ces deux faits. Et si ça a marché une fois, pourquoi ne pas tenter d’avoir une nouvelle rallonge salariale puisqu’une autre révision constitutionnelle se profile à l’horizon ? Sans vouloir faire de procès d’intention, c’est la seule explication que l’on peut trouver à la réunion du bureau de l’APN qui a discuté, il y a six mois, du principe d’une augmentation des indemnités (couvrant le logement, le transport et la restauration). Excédé par ce contexte «financier» malsain, le nouveau président de l’APN, Mohamed-Larbi Ould-Khelifa, a protesté avec la dernière énergie contre la rumeur qu’il a certainement considérée comme visant spécialement sa réputation, car sur celle de l’institution qu’il préside, il sait sans doute que l’opinion des Algériens est faite de longue date. Au moins depuis 2008, quand les salaires des députés ont été triplés pour représenter à ce moment plus de 25 fois le salaire national minimum garanti. Le choc avait été frontal avec la réalité sociale vécue par une grande partie de la population. Le président de l’APN ne veut pas endosser ce passif. C’est le but de son communiqué. Il fait savoir qu’il ne prend aucune des indemnités qui sont servies aux députés et se contente, lui, de son salaire simplement. Il y a chez Mohamed-Larbi Ould-Khelifa comme une honte à être augmenté. Pour une fois la décence a vaincu la cupidité.
Karim Bouali
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