Débordements de Paris suite au sacre du PSG : vers un «printemps des banlieues» ?
Les débordements qui ont émaillé les manifestations de joie des Parisiens suite au succès du PSG au championnat de football cachent un désarroi et un mécontentement qui risquent de dégénérer à n’importe quel moment. Les jeunes qui se sont adonnés aux actes de violence, brûlant des voitures et saccageant des boutiques sur les Champs-Elysées, viennent tous de la banlieue parisienne, véritable poudrière qui n’attend que l’étincelle pour exploser. Que le gouvernement soit de gauche ou de droite, cette frange marginalisée de la société française se sent abandonnée et mise à l’écart par un système qui refuse de les adopter et auquel eux-mêmes répugnent à adhérer. Même si les émeutes d’hier n’ont pas duré longtemps et qu’il n’y ait pas eu d’énormes dégâts, le débat houleux qui s’en est suivi à l’Assemblée démontre que ce genre d’incidents fait peur à la classe politique française, qui garde en mémoire les événements de 2005. Alors ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy avait opté pour le tout sécuritaire pour «affronter» des jeunes des banlieues en furie. Les scènes de violence qui avaient démarré à Clichy-sous-Bois, un quartier de la banlieue parisienne, s’étaient propagées à toute la France, touchant notamment les zones pauvres où le chômage enregistre des taux supérieurs à la moyenne nationale. Le gouvernement de droite avait dû décréter l’état d’urgence. Plusieurs centaines de jeunes issus de l’immigration avaient affronté la police, répondant aux propos provocateurs d’un Sarkozy plus proche de l’extrême droite que jamais – lequel promettait de «nettoyer les banlieues au Karcher» – par des cocktails Molotov. La police était parfois contrainte de riposter à balles réelles. Dix mille véhicules furent incendiés, des bâtiments publics saccagés et brûlés, des écoles vandalisées et des sièges d’associations pillés. Les violences de 2005, qui durèrent près d’un mois – les plus importantes en France depuis les barricades de mai 1968 –, avaient «réveillé» les responsables politiques français qui finirent par prendre conscience d’une menace réelle qui pèse sur l’Hexagone et la nécessité de recourir à la force publique, voire à l’armée, pour le rétablissement de l’ordre en cas d’atteinte sérieuse à la sécurité de ce pays. Un mémento sur la défense militaire terrestre, élaboré par le ministère français de la Défense, prévoit ce cas de figure. Dans ce document, toujours en vigueur, il est question de «désordres graves sur le territoire national sans intervention extérieure, mettant en cause la continuité de l’action gouvernementale [et] de la vie économique de la nation». «Sans intervention étrangère» signifie, de façon insidieuse, les troubles à l’ordre public pouvant venir des banlieues majoritairement peuplées d’immigrés issus du Maghreb et d’Afrique noire. Les événements d’hier sont une nouvelle preuve que le «printemps des banlieues» n’est peut-être pas si loin.
M. Aït Amara
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