La roulette russe
Le faux suspense savamment entretenu, des semaines durant, autour de la levée de l’embargo sur la livraison d’armes par l’Union européenne aux «rebelles» en Syrie a pris fin par le choix fait par l’UE de jeter de l’huile sur le feu. Pour attiser la guerre, il faut des armes. L’UE a fini par se soumettre à la pression de Paris et Londres et va en donner aux «rebelles» syriens. Il y avait une sorte de valse-hésitation provoquée par les réticences des dirigeants européens à la levée de l’embargo sachant que cette option n’allait pas dans le sens des efforts de paix et que les armes livrées tomberaient fatalement entre les mains des groupes terroristes qui forment l’essentiel de l’effectif des «rebelles». L’UE a penché finalement du côté des va-t’en guerre et va plonger dans le piège que les opposants à la levée de l’embargo voulaient justement éviter. L’afflux d’armes va faire éclater le conflit en plusieurs sous-conflits en Syrie. En effet, qui l'UE va-t-elle armer ? Si elle arme le camp dit «démocrate», elle provoquera la colère des extrémistes d'Al-Qaïda, autrement plus offensifs et plus pressés d'en découdre avec le régime d'Al-Assad. Armer ces derniers est impossible car cela reviendrait à se tirer une balle dans le pied. On se demande où Paris et Londres veulent en venir. Comment peuvent-ils être sûrs que les armes ne tomberont pas entre les mains des protégés d'Al Zawahiri ? Comment convaincront-ils leurs opinions publiques après l’attaque contre les deux militaires à Londres et Paris, laquelle attaque a réveillé l’extrême droite et ses corollaires la xénophobie et le racisme ? Dans le contexte actuel qui montre des progrès incontestables sur le terrain accomplis par l’armée syrienne et sur le plan diplomatique par la conférence de Genève 2 à laquelle participera le gouvernement d’Al-Assad, on peut penser que Paris et Londres, acculés à accepter ce nouveau rapport de forces, veulent tenter un coup de bluff pour déstabiliser Damas et le pousser à commettre des erreurs. Ou s’agit-il alors d’un coup de semonce, dans tous les cas, vain, en direction de la Chine et de la Russie ? L’avenir immédiat nous le dira.
Kamel Moulfi
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