Les aveux de Ghannouchi
Le quotidien arabophone El-Khabar a fait parler le chef islamiste tunisien Ghannouchi qui a dit des choses confirmant le caractère extrêmement dangereux de l’islamisme que les pays occidentaux veulent nous présenter comme «modéré». Les Algériens avaient connu ce genre d’hypocrisie chez Abassi Madani à la fin des années 80 et ils en ont eu la vérification dans la période du terrorisme que le FIS a inspiré dans les années 90. On comprend, en lisant l’interview, que Ghannouchi aurait fait la même chose, s’il n’avait pas pris le pouvoir en Tunisie ; il aurait appelé à prendre les armes pour y parvenir. Il reconnaît – mais est-ce une révélation ? – être en contact avec les terroristes, en particulier leur chef dont il dresse un portrait mensonger quand il dit qu’il est contre la violence. Ghannouchi ne fait preuve d’aucune originalité en adoptant un discours qui tend à minimiser la menace terroriste. Comme nous l’a montré le précédent algérien, l’islamiste tunisien, comme Abassi Madani, hier chez nous, ment à son peuple pour cacher son incapacité à faire front aux salafistes qui sont, au fond, ses alliés et dont il a besoin pour imposer l’hégémonie de son idéologie sur la société tunisienne. Son objectif inavoué, mais évident à travers son argumentation, vise à faire baisser la vigilance puis à démobiliser les forces démocratiques et les services de sécurité face au danger du terrorisme islamiste pour permettre à ce dernier de prendre racine puis se développer. En fait, Ghannouchi veut neutraliser définitivement les opposants à son projet théocratique. Comme ses pareils ailleurs, en Algérie notamment, il réfute l’idée qu’il y ait des dissensions au sein de son mouvement et les maquille quand elles sautent aux yeux. Autre confirmation de la démarche islamiste consistant à utiliser la démocratie pour tuer la démocratie : il ne compte pas quitter le pouvoir de sitôt. Pour lui, il n'y a pas d'alternative à Ennahda en Tunisie, alliances d'accord, mais céder le pouvoir aux autres, jamais. Au plan intérieur, Ghannouchi ne semble pas en mesure d’ouvrir le dossier Ben Ali dont il ignore l’étendu des malversations sur lesquelles il ne détient visiblement aucune preuve. Au plan externe, les soutiens financiers de Ghannouchi sont connus, là également, il le confirme : le Qatar et la Turquie (d'Erdogan) ! Sa haine pour le régime syrien qu’il qualifie de despotique ne surprend personne, par contre, les mots gentils qu’il a pour le voisin algérien cadrent parfaitement avec la nature manœuvrière et opportuniste des mouvements islamistes. Enfin, une révélation mais sans véritable surprise : du temps de Chadli, Ghannouchi et 500 islamistes d’Ennahda ont pu se réfugier en Algérie, véritable contribution au développement et à l'enracinement de l'extrémisme islamiste dans le Maghreb, dont nous avons payé un prix très élevé durant la décennie noire.
Kamel Moulfi
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