Affaire des moines de Tibhirine : le pari perdu du Figaro
Le Figaro tente, à nouveau, le pari pourtant, perdu d’avance, c’est une évidence, de faire rebondir l’affaire de l'assassinat des moines de Tibhirine pour impliquer l’Etat algérien, à travers son armée. Cette fois, il s’agirait d’«entraves» que les autorités algériennes mettraient à la recherche de la vérité, comme si elle n’était pas suffisamment connue. Le quotidien français réussit le véritable exploit de traiter de cette affaire sans la moindre référence au reportage «Le martyre des sept moines de Tibhirine» réalisé par Malik Aït Aoudia et Séverine Labat, et diffusé le 23 mai dernier sur France 3. Il comporte les témoignages sur les circonstances de ce tragique événement, de terroristes ayant participé à l’enlèvement dans la nuit du 26 au 27 mars 1996 puis à l’assassinat des sept moines. Leurs «aveux» ne souffrent d’aucune équivoque. En dépit de ce fait absolument nouveau, Le Figaro a révélé que les familles des victimes, par le truchement de leur conseil, Me Patrick Baudouin, l’avocat du félon Habib Souaïdia, ont adressé mardi soir au président François Hollande une lettre ouverte dans laquelle elles estiment que du côté algérien, «aucune action sérieuse n'a été entreprise pour faire la lumière sur ces assassinats». Pour Le Figaro, les autorités algériennes font preuve d’une «suspecte inertie» qui explique, selon lui, que «la commission rogatoire internationale délivrée en décembre 2011 par le juge parisien Marc Trévidic à Alger s'enlise depuis près de vingt mois». On comprend pourquoi Le Figaro ne parle pas du reportage d’Aït Aoudia et Labat. Depuis le début, à coups de mensonges et de manipulations inouïes de la part des autorités et de la presse françaises, l’affaire de l’assassinat des moines de Tibhirine n’a pas cessé d’alimenter la thèse du «qui tue qui» visant à discréditer l’armée algérienne engagée dans une lutte féroce contre le terrorisme. Or, voilà qu’un documentaire français fait intervenir des acteurs directs de ce drame et des témoins de premier plan. Les auteurs de l’assassinat sont désignés. En outre, le documentaire a fait ressortir le double jeu de la part des Français dans cette affaire, comportement qui reste une énigme. Mais l’énigme maintenant, c’est pourquoi Le Figaro – aidé par une journaliste française d’un journal algérien connu à Alger pour être proche de l’ambassade de France – veut réamorcer l’histoire du «qui tue qui» battue en brèche par les témoignages de terroristes du GIA qui reconnaissent être les auteurs de cette action criminelle ?
Kamel Moulfi
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