Crise politique égyptienne : vers une solution à l’algérienne ?
Après les grandes manifestations qui ont mobilisé des millions d’Egyptiens, dans toutes les villes du pays, et les affrontements sanglants qui ont fait jusqu’à ce lundi 16 morts et des centaines de blessés, aucune réconciliation ne semble possible entre une opposition décidée à aller jusqu’au bout de ses revendications, et un président de plus en plus isolé, même s’il tente encore de se montrer inflexible. Premier signe de cette fissure du pouvoir islamiste, la démission de quatre ministres du gouvernement Qandil, le même jour, au moment ou d’autres membres du gouvernement menacent de claquer la porte, en signe de solidarité avec les manifestants. Devant cette impasse et l’absence d’une solution politique, d’aucun redoutent un glissement vers la guerre civile. Et tous les regards se tournent alors vers l’armée. Chacun des deux camps essaie de l’avoir de son côté. L’ex-candidat aux élections présidentielles, Hamdine Sabbahi, a ouvertement appelé l’armée à sortir de ses casernements pour répondre à «l’appel du peuple». Or, les Frères musulmans, eux aussi, ne cessent de la presser pour intervenir contre les manifestants, au nom de la sauvegarde de la légitimité et de la cohésion nationale. Pour l’instant, l’institution militaire préfère observer une attitude neutre et se garde de se mêler directement dans cette grande confrontation, mais elle ne pourra rester sans réagir si, demain, la situation prend une autre tournure. Des observateurs étrangers n’excluent pas la réédition du «scénario algérien», où l’armée est intervenue pour interrompre le processus électoral de janvier 1992, qui allait permettre aux islamistes de s’emparer du pouvoir, mais après la démission du président de la République, qui était lui-même responsable de cette situation de crise. A la différence qu’ici, on réclame le départ d’un président islamiste, pour amorcer un nouveau processus électoral. L’armée est pourtant la seule force qui peut persuader le président Morsi de démissionner pour désamorcer cette grave crise et permettre ainsi un nouveau départ, avec de nouvelles élections présidentielle. Mais elle doit trouver les formes et, surtout, les arguments avalables pour le faire. En fin d’après-midi de ce lundi, le commandement des forces armées est sorti de son silence, pour lancer, à travers un communiqué lu à la télévision, un ultimatum de 48 heures aux protagonistes pour «répondre aux revendications du peuple», faute de quoi l’armée «assumerait ses responsabilités et prendrait en main la situation, à travers une feuille de route et des mesures pour superviser leur mise en œuvre».
R. Mahmoudi
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