Onomatopée politique
Par M. Aït Amara – Quand un commentateur algérien sur une chaîne sportive qatarie se met à l’analyse politique, cela donne un rot dont on ne sait pas trop dans quelle langue il est fait. Hier sous-fifre d’un ancien directeur de l’ENTV promu ambassadeur pour ses qualités inégalables de flagorneur, ce journaliste, qui commente des matches de football par une suite d’interjections et une imitation de sons, découvre sur le tard que l’Homme communique par un autre moyen que les onomatopées. Mais pourquoi ce passage du langage animal à la langue construite ? La réponse est simple. Dans ce magma d’opportunistes qui tournent autour du sérail formé par le Président et son entourage, les sous-ordres doivent ou plaire ou jouer à l’enfant turbulent qu’il faut calmer avant que les voisins, non encore réveillés d’un sommeil long et profond, n’ouvrent les yeux. Cet observateur averti de la balle ronde se détourne de sa vocation distractive pour professer la bonne gouvernance aux dirigeants et inculquer les valeurs aux dirigés. Il foule le terrain politique, court, drible, slalome comme ces joueurs de football dont il hurle l’exploit comme si un coup-franc réussi allait sortir l’humanité de la fange dans laquelle elle vasouille. Le match qui a duré quinze ans tire à sa fin. Les prolongations prévues dans les coulisses ont été annulées pour risque d’envahissement de terrain. Les joueurs suent sang et eau pour se faire sélectionner pour la finale de 2014. Et notre commentateur à la voix enrouée, à force de crier que le salut de l’humanité est dans le filet de but, troque déjà son micro contre un siège dans la tribune officielle attenante. Ne nous étonnons pas si l’homme aux vagissements célèbres devenait ministre. D’autres avant lui, même moins bruyants, le sont devenus.
M. A.-A.
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