Qui se soucie encore de La Casbah d’Alger ?
J'ai souvenance qu'au cours des années 80/90, les techniciens en tous genres se décarcassaient pour ramasser tuile par tuile, brique pleine par brique pleine et même les miettes de carreaux de faïence en vue peut-être de reconstituer La Casbah (utopie). A l'époque, Abdelkader Sahraoui, architecte, jeune et sérieux, me montrait avec désillusion des monceaux de gravats casbéen et des dizaines de malles pleines d'études faites par les Polonais, Turcs et autres Français… et que personne n'a ouvertes. J'ai vu des dizaines de malles non ouvertes aussi au palais du Bey lorsque la DNC/ANP, inexpérimentée, cimentait à tout va les façades. Naïfs que nous étions et que nous sommes toujours restés. Pourquoi, je vous raconte tout cela ? Ah ! Je me retrouve. Parce qu'en allant ce matin, lundi, à mon association d'enfants handicapés, au 32 rue Driss Hamidouche (ex-rue de la Casbah), j'ai pris la photo ci-dessus (voir dans galerie photo, ndlr) pour vous dire ce que deviennent les linteaux de l'époque turque, les colonnes en tuf, les faïences et les tuiles vertes. Dehors, dans les ordures et que personne ne ramasse ni ne regarde. Dire que Abdelkader Sahraoui les faisait comptabiliser pièce par pièce jadis, en 1987/90. La réhabilitation c'est du festi. Festi de tous. Pour faire de la réhabilitation, il faut être riche et en bonne santé. Et honnête intellectuellement sans jamais abandonner et surtout ne cherchant ni poste ni avantage pécuniaire ou en nature (voyages, caser les enfants et autres séminaires). Comme pour un homme de bien qui voudrait aider un autre plus faible, il lui faut être riche et en bonne santé morale et physique. Or, notre pays est pauvre : pauvre d'idées, pauvre de compromissions, pauvre de rejla et, en plus, tous veulent un poste dans un pays qui ne connaît pas l'apaisement, un pays dépecé comme dans la mort du loup de Musset et ce temps, ce temps qui va très vite. Plus vite que naguère où on allait rencontrer les amis, boire un coup, où on écrivait des cartes postales pour souhaiter l'Aïd. Ce que je fais toujours (je sais que ça fait plaisir qu'on reçoive une carte postale où il est écrit : saha 'îdek. Faites l'expérience le prochain Aïd, vous verrez. Les gens restent abasourdis : ouech, mazal hadha !). Le malheur c'est qu'on n'a plus d’amis et on n'a plus d’ennemis. Opacité totale. Brume et chuchotements.
Salut à tous et bon Ramadhan.
Abderrahmane Zakad
Nota : Les loyers étant bas, la Casbah se remplit de Maliens, de Nigériens et autres Burkinabès. Ne sont-ils pas chez eux en Afrique ?
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