Tunisie : Ennahda accusé du meurtre de Mohamed Brahmi
Natif de Sidi Bouzid en 1955, Mohamed Brahmi est la seconde personnalité politique d’opposition démocratique assassinée en Tunisie, après Chokri Belaïd, leader du Front populaire, tué dans des conditions quasi similaires le 6 février dernier à Tunis. Mohamed Brahmi représente la catégorie de patriotes qui, s’étant révoltés contre l’ancien régime, se sont vite opposés au régime islamiste qui s’est installé avec l’appui de certaines franges de la mouvance laïque, comme le Congrès pour la République de Moncef Marzouki. Homme de gauche convaincu, il était membre des Etudiants arabes progressistes et unionistes jusqu’en 2005, date à laquelle il a créé le Mouvement unioniste nassériste, un mouvement travaillant dans la clandestinité. Après la chute du régime de Zine El-Abidine Ben Ali, il créa le Mouvement du peuple. Il a été arrêté en 1981 et 1986, mais bénéficiant d’un non-lieu à chaque fois. Son assassinat coïncide avec l’annonce du gouvernement de l’identification des commanditaires du meurtre de Chokri Belaïd. Tous les Tunisiens s’interrogent après ce deuxième forfait : qui sera le prochain ? Si le chef du parti au pouvoir, Rached Ghannouchi, s’est empressé de condamner le crime, en l’imputant, encore une fois, à des «mains invisibles» qui chercheraient à déstabiliser le pays et à y semer la discorde, tous les doigts sont pointés vers Ennahda, pour avoir toléré et couvert les groupuscules fondamentalistes qui ont récemment réussi à interdire une représentation théâtrale dans la capitale. Ce n’est pas un hasard si les manifestants à Sidi Bouzid, la ville natale de Mohamed Brahmi, s’en sont violemment pris aux locaux du parti islamiste, au moment où la section locale de la centrale syndicale appelle à la désobéissance civile. L’onde de choc a très vite gagné Sfax, la deuxième ville du pays. A ce rythme, la Tunisie n’est pas loin de vivre une nouvelle insurrection populaire, similaire à celle qui a emporté l’ancien président.
Lina S.
Comment (16)