Pourquoi le terrorisme islamiste ne s’implantera pas durablement en Egypte comme en Algérie
Les événements qui secouent l’Egypte depuis ce que les Egyptiens appellent le «transfert du pouvoir» ont donné lieu à de nombreuses analyses pessimistes sur le plan sécuritaire. Les similitudes entre la vague de violence qui a secoué l'Algérie bien avant l'arrêt du processus électoral en janvier 1992 et les attaques épisodiques dans le Sinaï égyptien, font prédire à beaucoup d’observateurs une réaction violente des islamistes après la destitution de Morsi. Or, notent des experts algériens dans la lutte antiterroriste, des différences de taille existent entre les deux pays. D’abord, le relief. Nos sources rappellent que l’Egypte et l’Algérie ont deux géographies différentes. En effet, les groupes islamistes armés algériens étaient concentrés – au début de leur action armée – dans le Nord, constitué d’une multitude de reliefs et sillonné par les massifs montagneux du Dahra, de l’Ouarsenis, du Hodna, du Djurdjura, des Babors, des Bibans et des Aurès. Des régions dont le sol est couvert de nombreuses forêts. En Egypte, les caractéristiques géographiques diffèrent totalement. Dans ce pays au climat semi-désertique, seule la bande fertile autour du Nil est propre à l’implantation humaine. Le reste est recouvert par le désert. Si, donc, en Algérie, les terroristes avaient l’avantage du terrain pour mener des actions armées furtives et se replier dans des casemates sous des bois touffus et des maquis escarpés, en Egypte, une telle possibilité de camouflage et de repli sécurisé n’existe pas. Les actions terroristes sont concentrées dans le Sinaï – dans le Nord-Est – qui forme une des trois étendues désertiques du pays, avec les déserts libyque à l’ouest et arabique à l’est. Hormis cet aspect lié à la topographie, nos sources font remarquer que l’armée égyptienne, bien qu’inexpérimentée dans la lutte antiterroriste, compte un effectif suffisant pour faire face à ce phénomène. Des erreurs pourraient avoir été commises lors des attaques subies par des soldats égyptiens à El-Arich, mais l’état-major a dû les corriger au fur et à mesure et adapter la riposte à la nature de l’ennemi. Un ennemi intérieur qui adopte la stratégie du faible au fort, basée sur des embuscades et des attentats, mais jamais sur la confrontation directe vu l’inégalité des forces. Les groupes terroristes recourront, dès lors, à des actions spectaculaires mais sporadiques et très espacées dans le temps. Par ailleurs, ajoutent nos sources, les Egyptiens peuvent compter sur l’ubiquité des services des renseignements égyptiens, pléthoriques et dont les agents se sont fondus dans la population, depuis leur structuration sous Djamel Abdennasser. Ces trois éléments minimisent les possibilités d’implantation à grande échelle du terrorisme en Egypte, même si, relativisent nos sources, les terroristes peuvent compter sur le caractère fataliste des Egyptiens et la grande misère d’une bonne partie de la population qu’ils pourraient exploiter pour recruter des combattants fanatisés. De même qu’ils pourraient s’appuyer sur une base arrière pour effectuer des «sauts de puce» à partir de Gaza et franchir la frontière de nouveau une fois leurs actions exécutées sur le territoire égyptien.
Karim Bouali
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