Que faut-il en retenir ?
Par Karim Bouali – Le mois de Ramadhan tire à sa fin. Le contexte estival avec des jours très longs écrasés sous un climat chaud et humide a accru sa pénibilité et donné bonne conscience à ceux qui saisissent cette occasion pour faire tourner au ralenti leurs activités professionnelles et tout le pays avec. Mais ce n’est pas seulement cette caractéristique qui restera dans les mémoires. Il a été marqué par un fait nouveau qui concentre en lui bien des changements dans notre société : des non-jeûneurs ont bravé l’interdit et qu’ils l’aient fait à Tizi Ouzou, réputée ville «rebelle», ne diminue en rien sa signification. Ils ont répondu ainsi à la répression qui frappe depuis quelque temps ceux qui n’observent pas cette prescription religieuse (il y avait plus de tolérance à leur égard les premières années qui ont suivi l’indépendance) et ont transformé un acte qualifié de péché (casser le carême) en action de masse avec ce déjeuner en plein jour et en public organisé comme une action de protestation. Autre fait nouveau : les autorités et les citoyens ont réagi pacifiquement observant ce fait comme un «non-événement», ce qui est, en soi, il faut le reconnaître, un «événement». Braver l’interdit non seulement sans s’attirer les foudres de la répression mais en levant, par cet acte, l’interdit lui-même, les non-jeûneurs de Tizi Ouzou n’espéraient certainement pas atteindre ce but. Pour le reste, que faut-il retenir de ce Ramadhan ? Bien sûr, l’absence publique, en raison de sa maladie, du chef de l’Etat qui, habituellement, préside à la cérémonie, retransmise en direct à la télévision, de la veille du 27e jour. Les membres du gouvernement ont été dispensés des réunions bilans qui passaient au peigne fin tous les départements ministériels et qui étaient devenues, avec le temps et pour leur caractère formel, une banalité. Côté consommation : cette année les prix qui ont pris leur envol, comme d’habitude, en dépit des assurances des ministres concernés, n’ont pu être maîtrisés que par une tactique, adoptée par les Algériens, de façon pragmatique mais dictée également par un pouvoir d’achat érodé, qui ont visiblement modifié leur comportement et acheté moins. Dans ce rapide survol du Ramadhan, on a failli oublier le terrorisme qui, en réalité, s’est fait oublier, chez nous, grâce à l’action de l’armée. Par contre, il était présent comme fait réel et comme menace chez nos voisins tunisiens et en Egypte aussi, dont l’actualité mouvementée a meublé les discussions des veillées d’un Ramadhan qui préfigure sans doute ce que seront les prochains, du moins faut-il l’espérer : un comportement citoyen à la fois plus rationnel dans la boulimie et plus tolérant à l’égard des autres.
K. B.
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