La tôle faute de toit
Par Kamel Moulfi – Près de 20 000 souscripteurs AADL vont être traînés en justice pour fausses déclarations. Il s’agit de personnes qui auraient menti en déclarant sur l'honneur qu'elles ne possèdent pas un bien à usage d'habitation ou un terrain à bâtir, et qu'elles n'ont bénéficié d'aucune aide financière de l'Etat pour l'acquisition ou la construction d'un logement. Une base de données mises sur un fichier national permet de démasquer une telle supercherie. Mais une question vient immédiatement à l’esprit : pourquoi ces milliers de faux dossiers n'ont pas été rejetés dès le départ au cours de la phase de vérification ? Elle en appelle une autre : les près de 20 000 logements ont-ils été construits et affectés à ces fraudeurs avant la découverte du mensonge ? Dans ce cas, enfin, à qui ont-ils été donnés et sur la base de quelle procédure et de quels critères ? Avec l’emploi, le logement est la préoccupation inscrite en tête des priorités des Algériens. La plupart des émeutes qui éclatent particulièrement dans les villes de l’intérieur du pays, mais aussi dans les grands centres urbains, ont pour motif la distribution de logements. On comprend aisément pourquoi, quand elle avait été lancée, l’opération AADL avait suscité un grand engouement. En plus, le prix était abordable et la confiance des souscripteurs était confortée par l’idée que la formule, nouvelle dans le genre, était fondée sur le principe de l’égalité des chances. Il y avait également la conviction qu’elle était entourée de toutes les conditions de réussite et enfin – c’était sans doute là la plus grande illusion – tout le monde pensait qu’elle échapperait à la prédation qui n’a épargné quasiment aucun domaine dans notre pays. Lorsque les retards ont commencé à apparaître, l’espoir a fondu et la désillusion s’est installée. Refusant de se laisser gagner par le désespoir, les souscripteurs n’ont pas cessé de manifester pour empêcher qu’on les prive de leur bien. Ce qui devait être une simple distribution de logements a tourné à la confrontation entre le citoyen-souscripteur et l'administration, deux composantes de l'Etat en guerre permanente, comme si l'administration n'était pas elle-même composée de citoyens. L’AADL, c’était trop beau pour être vrai. Au moins pour près de 20 000 Algériens qui, non seulement ont vu leur rêve brisé, mais risquent de passer de mauvais moments avec la justice.
K. M.
Comment (8)
Les commentaires sont fermés.