Qui veut allumer la mèche à Bordj Badji-Mokhtar ?
La paisible ville de Bordj Badji-Mokhtar, à la frontière avec le Mali, a été secouée, hier mercredi, par de violents affrontements ethniques. Il a fallu une intervention musclée et un déploiement massif des gendarmes pour ramener le calme. Les échauffourées, qui ont provoqué la dégradation de nombreux biens, ont suscité à la fois indignation, stupéfaction, inquiétude et interrogations. La violence, quelles que soient sa forme et ses raisons, est condamnable. Elle est étonnante quand elle éclate dans un espace communautaire réputé pour sa quiétude où les gens sont réputés pondérés, calmes et indulgents. Les Touareg de Bordj Badji-Mokhtar ont, en effet, coexisté pendant de longues années avec les Arabes venus de tous les horizons sans qu’il y ait eu de conflit ou de guerre intercommunautaire. Au contraire. Ils vivent en symbiose. Que s’est-il passé mercredi pour soulever les deux communautés l’une contre l’autre ? Qui est derrière ces affrontements ? Quelle en est la raison ? Autant de questions qui peuvent trouver la réponse dans la position géographique stratégique de cette ville située aux confins du désert et dans la nature de sa population cosmopolite. Une population en constante transhumance. Elle est composée non seulement d’Arabes, mais de bien d’autres ethnies et nationalités. Il y a, parmi les habitants de cette daïra, de nombreux nomades qui se sont difficilement sédentarisés. Certains d’entre eux refusent même la nationalité algérienne et ne reconnaissent pas la frontière qu’ils traversent comme ils veulent pour aller aussi bien au Mali, en Mauritanie qu’au Sahara Occidental. Ce mouvement incessant de la population nomade rend difficile la quantification et le contrôle des résidents et permet à des gens étrangers de s’introduire dans la région et de s’y installer en toute quiétude. Ce regroupement de personnes originaires de différents pays peut en effet constituer un facteur de tension et une source de conflit que des milieux malintentionnés peuvent exploiter et manipuler à leur guise dans le but de créer des troubles sur le sol algérien. Seul pays stable de la région, l’Algérie est ceinturée par des pays qui sombrent dans d’interminables troubles et violences. L’éclatement de tels heurts est plus qu’inquiétant, car il intervient à un moment où des jeunes du Sud se soulèvent pour réclamer «leur part» du pétrole en dénonçant l’occupation systématique des postes de travail par des employés envoyés des régions du nord. Ces affrontements interviennent aussi dans un contexte politique plombé par la maladie prolongée du président de la République. D’où cet appel du wali d’Adrar à la «sagesse» et à la «vigilance» pour éviter de tomber dans le piège de la manipulation. Nous y reviendrons.
Sonia B.
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