Le moudjahid Vergès
Par Kamel Moulfi – La nouvelle de la mort de Maître Jacques Vergès est tombée comme un couperet, tard dans la soirée d’hier, et a fait remonter dans la mémoire des Algériens le souvenir de son action courageuse durant la guerre de Libération nationale, quand défendre les combattants du FLN devant les tribunaux militaires français pouvait coûter la vie à un avocat. C’est dans cette période qu’il mit au point sa démarche de «défense de rupture» en retournant la situation en faveur des accusés transformés en accusateurs de l’oppression coloniale. Fidèle à ses convictions anticolonialistes affichées depuis son très jeune âge et en droite ligne de sa participation à la résistance antinazie, Jacques Vergès a, en effet, pris résolument position en faveur de l’indépendance de notre pays. Dans cette action courageuse – il faut insister sur cette qualité – à nos côtés, il a même adopté le surnom de Mansour et n’a pas craint qu’on dise de lui qu’il s’est converti à la religion musulmane pour pouvoir épouser la militante Djamila Bouhired qu’il défendit dans le procès des poseuses de bombes du FLN, presque toutes condamnées à mort puis graciées. Jacques Vergès a fait de son métier d’avocat et de la célébrité qu’il a acquise dans les prétoires des moyens de lutte contre le système occidental, ce qui lui a valu l’hostilité non seulement de certains de ses confrères mais plus largement de la presse française de droite, au service des intérêts néocolonialistes. Il s’est amusé à les provoquer en prenant la défense de personnes soumises au lynchage médiatique en France, aussi différentes les unes que les autres, à l’image du militant antisioniste libanais Georges Ibrahim Abdallah et de l’ancien nazi Klaus Barbie, mais aussi de personnes condamnées avant d’être jugées, comme Omar Raddad. A ces occasions, ses petites phrases ont fait le régal des médias. On l’a vu, dernièrement, avec Roland Dumas, aller systématiquement à contrecourant des positions de la France officielle sur les questions internationales, y compris quand elles paraissaient faire consensus, comme ce fut le cas pour l’intervention en Libye ou le coup de force contre Laurent Gbagbo. Un hommage unanime lui a été rendu, visiblement teinté d’hypocrisie chez ceux qui lui vouaient une haine qu’ils n’arrivaient pas à cacher.
K. M.
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