Présidentielle : il y aura des candidats mais pas de partis
La focalisation sur les partis islamistes laminés en Algérie a occulté un phénomène dans le phénomène. En effet, les démocrates, qui ont pavoisé à la vue des formations politiques issues de la mouvance islamiste se casser les dents lors des dernières élections législatives et locales, ont perdu de vue un fait d’une importance capitale, celui de la pulvérisation de la classe politique dans son ensemble. A l’approche de l’élection présidentielle de 2014, que reste-t-il de l’échiquier politique national ? Un survol rapide permet de constater que le jeu politique dans le pays a été réduit à une pièce de théâtre avec un seul acteur et une multitude de figurants. Si la page de l’islamisme politique est définitivement tournée et si le terrorisme a été considérablement affaibli – le nouvel appel lancé par l’armée aux «égarés» de se rendre en est un signe indubitable –, il n’en reste pas moins que c’est tout l’édifice institutionnel du pays qui a été anéanti durant ces quinze dernières années. Les partis hier rivaux ou appendices du FIS, qui se sont atomisés au fil des années pour se multiplier en une multitude de coquilles vides, ont largement prouvé aujourd’hui leur obsolescence pour la simple raison qu’un parti d’obédience religieuse ne peut s’imposer que par la violence. Les partis dits démocrates se sont effacés d’eux-mêmes, incapables de mobiliser une population qui leur est «étrangère» – Saïd Sadi disait qu’il s’était trompé de société. Faute de pouvoir s’imposer et de s’unir, les démocrates ont fini par se disloquer mais, paradoxalement, leur quasi-disparition de la scène politique n’a pas servi aux islamistes autrement plus opportunistes qui ont, eux aussi, échoué à «ramasser» les restes du parti dissous. Entre les deux, les deux partis qui se réclament du nationalisme, le RND et le FLN, se sont embourbés dans une crise de succession qui dure depuis plusieurs mois et qui paraît conduire les deux formations de l’Alliance droit vers l’implosion. Les deux partis accusent un grave déficit de légalité. Le FLN, dont il est demandé avec de plus en plus d’insistance la restitution du sigle au peuple, a été absorbé par le régime pour lui conférer une reconnaissance factice et diriger le pays au nom de la légitimité historique. Le RND qui, lui, n’a jamais été reconnu comme étant un parti «conventionnel» avec une direction et une base militante mourra de sa plus belle mort une fois que le système actuel disparaîtra. Il ne restera alors du RND, créé par trois ou quatre personnes dans un bungalow de la côte ouest d’Alger, que les trois lettres qui rouilleront vite. En 2014, il y aura des candidats mais il n’y aura pas de partis capables de les porter : ils ont été dissous dans un régime ultra-présidentiel incapacitant.
M. Aït Amara
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