Dix films algériens au dixième Festival de cinéma africain de Cordoue
Dans sa dixième édition, le Festival de cinéma africain de Cordoue (FCAT) poursuit la tendance inaugurée l’année dernière en accueillant une vaste sélection de cinéma provenant du monde arabe, en mettant l’accent cette fois sur les titres algériens les plus actuels qui abordent le sujet des «Printemps arabes» depuis une perspective rénovatrice. L’Algérie traverse aujourd’hui une période intense de régénération culturelle, menée aux écrans par un groupe des jeunes cinéastes autodidactes qui contribuent avec leurs nouvelles narratives à apporter un souffle d’air frais à la cinématographie du pays. Dans l’édition précédente, à l’occasion du 50e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie, le FCAT a dédié une section à l’histoire du cinéma algérien, en rassemblant des films clés de ce pays qui a constitué la force motrice du nouveau cinéma arabe. Cette année, le FCAT révise les titres les plus actuels en sélectionnant dix films algériens, dont une partie importante a été réservée aux nouveaux projets documentaires et aux courts-métrages réalisés par des jeunes réalisateurs tels que Djamil Beloucif, Hassen Ferhani ou Lamine Ammar-Khodja, qui font partie de cette nouvelle génération hétérodoxe qui propose de nouveaux regards et tendances stylistiques inhérentes à un processus dynamique de changement. Parmi ceux-ci, le documentaire Demande à ton ombre (2012), de Lamine Ammar-Khodja, dans la catégorie en compétition «Del otro lado del estrecho» (De l’autre côté du détroit). Il est représentatif de ce nouveau courant qui dresse un portrait des «Printemps arabes» depuis un point de vue différent. Ces films mélangent la réalité et la fiction et mettent l’accent de manière humoristique et ironique sur certains aspects des histoires individuelles, en marge des grands événements. Le film d’Ammar-Khodja nous révèle le regard cinématographique de ce jeune réalisateur qui raconte à la première personne d’une manière libre et humoristique son retour en l’Algérie après huit ans en France. C’est dans la boîte (2013) est une coproduction française de Djamel Beloucif et traite également le sujet de l’émigration au travers les habitants d'un quartier défavorisé de France, jouant avec l’improvisation des acteurs.
Motivés par la nécessité de dépeindre une étape de changement, ces réalisateurs travaillent souvent avec très peu de moyens, mais cet obstacle ne les empêche pas de continuer à créer mais au contraire il devient pour eux un stimulant. C’est dans ce sens que sont conçus les trois courts-métrages algériens qui font partie de la section en compétition «África en corto» (L’Afrique en Court) : des œuvres qui compensent leur manque des moyens avec une force narrative énorme et très efficace. C’est le cas d’Al Djazira (A. Sidi Boumediène, 2012), Les jours d'avant (K. Moussaoui, 2013) et Tarzan, Don Quichotte et nous (H. Ferhani, 2013), un court-métrage inscrit dans cette nouvelle vague de cinéma algérien, tourné dans un style particulier aux nombreux travellings dans les rues d’Alger. En ce qui concerne la fiction, il y a trois films programmés dans la section en compétition «El sueño africano» (Le Rêve Africain) : Yema, par Djamila Sahraoui (2012), récompensé au Fespaco 2013, raconte l’histoire d’une mère qui a perdu son enfant et qui se sert d’un petit jardin pour retrouver les forces et l’espoir afin de reconstruire sa vie. Rengaine (2012), par Rachid Djaïdani, est un film algérien tourné en France qui a réussi à arriver au Festival de Cannes malgré son manque de moyens et qui raconte les difficultés d’un couple composé d’un jeune Noir chrétien et une jeune maghrébine qui font face aux contraintes imposées par la famille de la fille qui fera tout le possible pour empêcher le mariage. De plus, à l'occasion du dixième anniversaire du Festival de cinéma africain, deux autres films algériens seront projetés dans la rétrospective «Diez fragmentos de un discurso de amor africano» (Dix fragments d’un discours d’amour africain), qui récupère une sélection des films autour de l’amour : On ne mourra pas (2010) par Amal Kateb, et Roma Wa la N'touma (2006), réalisé par l’Algérien Tariq Teguia, représentant à la perfection cette nouvelle vague de cinéma algérien, en cassant les narratives conventionnelles, mélangeant fiction et réalité, proche du film-essai et avec un regard cinématographique d'auteur.
R. C.
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