Aïd : nos villes deviennent des bergeries à ciel ouvert
Demain, les Algériens vont fêter l’Aïd Al-Adha où seront sacrifiés quelques millions de moutons. Comme chaque année, cette fête charrie son lot de joie et de bonheur pour les familles. Mais aussi, et surtout, elle provoque désordre et insalubrité. Envahies par les moutons depuis quelques semaines, nos villes sont dans un état déplorable. Dans les rues, les caves, les cages d’escaliers, à l’intérieur des appartements, sur les balcons, dans les voitures, le foin est absolument partout. Les trottoirs et les escaliers des immeubles sont également couverts d’excréments et d’urine de mouton. Les grandes villes du pays ont été transformées le temps de cette fête en des bergeries à ciel ouvert. Du déjà vu ! Car chaque année, c’est le même décor et le même constat de dénonciation qui reviennent. Ces scènes persistent depuis cinquante ans. Et rien n’indique qu’elles vont cesser dans les années à venir, tant la saleté fait désormais partie du décor de nos villes totalement «ruralisées». Les odeurs nauséabondes agressent les narines, les crottes de moutons s’écrasent allègrement sous les souliers des passants, s’ajoutant ainsi à un paysage attristant. La vente du mouton se fait partout, sur le trottoir, dans des garages aux murs lépreux, devant des entrées d’immeubles ou de villas ; l’improvisation de ces nouveaux bergers n’a plus de limites. On a vu des salons de coiffure, des pizzerias, des épiceries et des stations de lavage se transformer en des endroits de vente d’un cheptel acheté bon marché à M’sila, Djelfa ou ailleurs. L’Aïd Al-Adha est une belle occasion pour ces marchands occasionnels de s’enrichir sur le dos des chalands et au détriment de la propreté et du civisme. Les autorités laissent faire. Au lieu d’organiser cette activité commerciale qui revient anarchiquement à la veille de l’Aïd, les autorités locales délivrent sans le moindre contrôle ni vérification des autorisations pour l’ouverture de points de vente, qui ne répondent, bien entendu, à aucune norme d’hygiène et de propreté. S’ajoutent aussi une multitude d’endroits non déclarés où s’exerce normalement ce commerce de moutons sans que les pouvoirs publics ne bronchent. Cinquante ans après l’indépendance, les gouvernants n’ont pas pensé à aménager des espaces et à mettre en place des structures pour réglementer et réguler cette activité commerciale. Ce spectacle désolant que l’on voit à la veille de chaque Aïd Al-Adha est la conséquence de la non-implication de l’Etat dans l’organisation de la vente du mouton de sacrifice. Jusqu’à quand ?
Sonia B.
Comment (11)