Désobéissance tolérée
Par Kamel Moulfi – Le secteur du commerce de détail met régulièrement l’autorité de l’Etat au défi. A l’occasion de l’Aïd El-Adha, c’est carrément une humiliation que les commerçants ont infligée au gouvernement. Les perturbations dans les grands centres urbains – c’était flagrant – ont commencé la veille avec la rareté du pain. Les prix, pour leur part, se sont envolés au nom du principe de l’offre et de la demande derrière lequel le ministère du Commerce cache l’impuissance de ses services de contrôle à faire face aux infractions à la loi. En fait, l’Etat ne joue pas son rôle dans la protection du citoyen abandonné à la voracité d’une catégorie de marchands qui trouvent dans ces circonstances la possibilité de s’enrichir facilement. Si on ajoute le fait que tout cela se déroule dans l’informel, c'est-à-dire en violation de toutes les lois et donc en échappant particulièrement aux obligations fiscales, on mesure encore mieux l’étendue de la démission des pouvoirs publics dont les représentants savent tout et laissent faire. Le laxisme, motivé parfois par la crainte de l’émeute que la répression d’une infraction peut entraîner, produit des résultats catastrophiques dans un autre domaine, celui des accidents de la route. Là, également, ni la loi ni les amendements destinés à la rendre plus sévère, encore moins les discours, n’empêchent ce fléau de prendre des proportions de plus en plus grandes. C’est comme si la désobéissance civile était tolérée dans le secteur du commerce de détail et sur les routes. Le cadre de vie aussi, c’est-à-dire l’hygiène et la salubrité, mais pas seulement ces aspects, subit des agressions caractérisées dans l’indifférence des agents de l’Etat. On finirait par croire que la consigne donnée au personnel chargé de faire appliquer la loi est de ne rien faire, au point où, dans les rares cas où l’autorité de l’Etat se manifeste, les personnes concernées trouvent que ce n’est pas «normal» et se croient dans leur droit de protester. Il y a encore beaucoup de chemin à faire pour arriver à l’Etat de droit que le citoyen souhaite voir s’instaurer.
K. M.
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