Le Maroc veut devenir un hub financier avec des caisses vides
Casablanca, capitale économique du royaume du Maroc est en passe de devenir un hub financier leader dans le continent africain.» L’information rapportée par Forbes Magazine dans son pendant électronique pourrait apparaître, au commun des lecteurs, comme une preuve irréfutable de la bonne santé financière et économique de notre voisin de l’ouest. En effet, il faut reconnaître que cette image quelque peu rocambolesque de grande place financière que les autorités marocaines tentent de donner de leur pays contraste avec la situation économique du royaume dont les voyants virent pour la majorité d’entre eux au rouge. Le magazine présente même l’information de façon magistrale en insistant sur une hypothétique «ambition royale formulée avec une ferme volonté depuis le début du règne du souverain». «Depuis l'accession au trône de Sa Majesté le roi Mohammed VI, le souverain a nourri une ambition formulée avec une ferme volonté, celle de faire de la grande métropole marocaine et centre économique, une plateforme financière leader dans le continent africain», souligne le magazine américain dans un article intitulé : «Le roi Mohammed VI édifie une nouvelle citée financière pour le monde». C’est à se demander comment et pourquoi une publication si prestigieuse a pu sombrer tête baissée et les yeux fermés dans une entreprise de lèche-bottes aussi incroyable. Le magazine américain n’est tout de même pas sans ignorer la situation économique de ce pays, notamment dans son volet financier en grande difficulté. Une situation qui a contraint les autorités à demander l’aide du Fonds monétaire international qui lui avait accordé un prêt de 6,2 milliards de dollars en 2012. Cependant, le FMI était allé en juin dernier jusqu’à menacer de retirer cette ligne de crédit au Maroc, en raison de la lenteur avec laquelle sont menées les réformes structurelles dans ce pays. Les autorités marocaines reconnaissent d’ailleurs publiquement les difficultés auxquelles est confronté le système financier de leur pays en butte à un manque important de liquidités bancaires. Selon les chiffres officiels, les besoins des établissements bancaires du royaume sont estimés à 73,8 milliards de dirhams en septembre. Et le phénomène n’est apparemment pas près de s’estomper, puisque ce manque de liquidités a continué à s’aggraver, passant de 71,6 milliards de dirhams en août à 73,8 milliards de dirhams en septembre. «Le creusement du déficit des liquidités bancaires est dû notamment à l’impact restrictif de 2,2 milliards de dirhams marocains exercé par les facteurs autonomes de liquidité sur les trésoreries bancaires, en relation essentiellement avec le repli des réserves de change de Bank Al-Maghrib», explique un journal marocain qui note que «la circulation fiduciaire a eu un effet expansif sur la liquidité bancaire». Comment un tableau aussi sombre sur le plan financier peut permettre à un pays de devenir une place financière régionale, voire internationale ? Pour le moment, on ne peut que se poser des questions sur cette manière de présenter, par le biais d’un magazine de portée internationale, un pays comme une puissance économique au moment où ses perspectives n’augurent rien de bon.
Amine Sadek
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