Pourquoi aucun Algérien n’a démissionné d’Al-Jazeera ?
La vague de démissions à la chaîne de télévision qatarie se poursuit, avec l’annonce dernièrement par la journaliste égyptienne Nourane Salam de sa décision de quitter définitivement Doha. A l’instar de nombre de ses compatriotes, la journaliste justifie sa décision par son désaccord avec le traitement réservé par Al-Jazeera aux événements qui secouent son pays. Dans une déclaration à la presse, elle a indiqué qu’elle avait essayé de couvrir l’actualité égyptienne «avec une certaine neutralité et objectivité», mais cela n’a pas plu à ses responsables. Plusieurs correspondants locaux en Egypte avaient annoncé leur démission entre juillet et août 2013, parfois en direct à l’antenne, comme l’ont fait au moins deux correspondants d’Al-Jazeera Mubachir. Tous dénoncent la partialité de la ligne éditoriale de la chaîne et sa tendance à attiser le feu de la discorde dans leur pays, en prenant position en faveur des Frères musulmans contre l’Etat et l’armée. Entre 2011 et 2012, une dizaine de journalistes et correspondants syriens et libanais avaient également annoncé leur retrait, dénonçant la falsification des faits et l’intoxication pratiquée par la direction de la chaîne, au moment de l’éclatement des événements en Syrie. Parmi eux, le directeur du bureau de Beyrouth, le Tuniso-Libanais Ghassan Benjeddou, qui a ensuite lancé Al-Mayadeen. Durant la même période, les correspondants de la chaîne à Riyad, à Kaboul, à Paris et à Moscou avaient claqué la porte pour les mêmes motifs. L’ex-correspondant à Berlin, le Syrien Aktham Souleyman résume cette fronde, en déclarant à un média arabe : «Al-Jazeera a perdu totalement son professionnalisme pour devenir un instrument de propagande et de manipulation des foules, au service d’un agenda imposé par le régime du Qatar.» La mise à l’écart de son ancien directeur général, Wadhah Khanfar, proche des Frères musulmans et des officines américaines, et son remplacement par l’Algérien Mustapha Souag n’a pas mis fin à cette saignée. Mais on ne risque pas de voir les Algériens faire preuve de courage et emboîter le pas à leurs collègues, visiblement plus dignes. Pas un Algérien n’a eu l’idée de se retirer pour exprimer l’indignation que ressent la majorité de leurs concitoyens envers cette chaîne qui leur a toujours montré un visage hostile. Au contraire, les trois ou quatre éléments visibles – Benguenna, Derradji et Souag –, pourtant issus de la Télévision nationale, font montre d’un zèle excessif pour défendre les intérêts de leur employeur au détriment de ceux de leur patrie, comme on l’a vu récemment dans l’affaire de la retransmission du match Burkina Faso-Algérie par l’ENTV.
R. Mahmoudi
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