Le Maroc est-il réellement un Etat indépendant ?
Le Maroc n’est pas sorti de la dépendance à l’égard de la France. Les dirigeants français, qu’ils soient de droite ou de gauche, se comportent comme si le royaume était toujours un protectorat. S’il en fallait une preuve, elle est donnée par le voyage effectué ces jours-ci par le président de l'UMP, Jean-François Copé, dans ce pays. Officiellement, c’est Copé lui-même qui le dit, il a fait le déplacement pour évoquer «la France de demain». Le Maroc en ferait-il partie au point où ses dirigeants sont tenus informés des projets de l’UMP sur l’avenir de la France ? En tout cas, Nicolas Sarkozy, qui caresse sans doute l’idée de revenir à l’Elysée, ne dédaigne pas passer ses vacances dans la résidence royale du roi au cœur de Marrakech, à l’invitation de ce dernier, d’ailleurs. Un séjour au milieu d’une belle palmeraie n’est pas le seul cadeau que s’offre l’ancien président français au Maroc. En septembre 2011, en président, il avait lancé, avec le roi Mohammed VI à Tanger les travaux de ce qui a été présenté comme le «premier TGV arabe et maghrébin». Peu après, il inaugurait le tramway de Casablanca (qui a coûté l’équivalent d’une année du budget de l’Etat, dixit le cousin du roi, opposant). Sarkozy ne cherchait pas à le cacher : «Ce projet est très bénéfique pour les Français.» Naturellement, c’est une bonne affaire pour les groupes français et une très mauvaise pour la population marocaine, d’abord à cause du prix prohibitif du ticket et surtout de l’endettement dont elle subit les conséquences. En fait, les Français se comportent au Maroc en conquérants. Ils ont racheté pratiquement tous les riads à Marrakech (villas traditionnelles très prisées par les hommes politiques, le gotha du showbiz et les retraités français), faisant des Marocains leurs porteurs de couffin et des Marocaines leurs boniches. Sur la question du Sahara Occidental, il y a une complicité évidente de la France avec le Maroc, d’où le silence observé devant les dépassements du Makhzen et les atteintes aux droits de l’Homme dont sont victimes les militants sahraouis, la répression féroce des manifestations, l’arrestation de journalistes, car il ne faut pas «réveiller» l’opinion publique française qui risquerait de faire perdre des points dans les sondages aux responsables politiques – qu’ils soient de droite ou de gauche, faut-il encore le préciser – en charge du maintien de ce pays pauvre sous le joug français.
Kamel Moulfi
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