Les médias publics instruits de promouvoir le bilan de Bouteflika
Les médias lourds publics, et sans doute même la presse écrite publique, viennent de recevoir des instructions officielles de la part du gouvernement de ne plus couvrir les sujets «qui fâchent» et de promouvoir le bilan du président Bouteflika depuis son intronisation en 1999 à la tête de l’Etat. L’instruction a jeté le froid parmi les journalistes dont la marge de manœuvre était déjà bien rétrécie depuis l’avènement au pouvoir d’un Bouteflika qui se considérait depuis le début comme «le premier rédacteur en chef de l’APS». Le cap est donc mis sur davantage de verrouillage de la liberté de la presse dans le secteur public. Exit donc l’impératif de service public. Les médias lourds, la télévision et la radio, doivent donc être mis au service d’une seule cause : les réalisations de Bouteflika depuis son arrivée au pouvoir. La directive ne s’arrête pas là, puisqu’il est expressément demandé aux responsables de ces organes et aux journalistes qui y exercent de ne plus traiter les informations et les dossiers mettant en exergue les sujets qui risquent de ternir le bilan des trois mandats. La nomination d’Abdelkader Messahel, un fidèle parmi les fidèles de Bouteflika depuis les années 70, à la tête du ministère de la Communication aurait-elle finalement pour seul but que d’accentuer la mainmise du pouvoir politique sur les médias lourds en prévision de la présidentielle de 2014 ? Pour certains observateurs avertis, il apparaît évident que cette initiative entre dans le cadre d’une stratégie bien établie et menée tambour battant par le cercle présidentiel, tendant à verrouiller complètement le jeu politique dans la perspective de cette échéance. Sinon, comment expliquer les changements intervenus ces derniers mois au sein du gouvernement, des institutions et des partis proches du pouvoir ? Le coup de force ayant mené à l’intronisation du très controversé Amar Saïdani à la tête du FLN a sonné le début d’une reconfiguration de l’échiquier politique après le retour de Paris de Bouteflika. Après le FLN, c’est vers la RND que les regards se sont tournés avec la désignation du président du Conseil de la nation, Abdelkader Bensalah, à la tête du parti. Les changements opérés au sein de l’exécutif, avec notamment la promotion d’Amara Benyounès à l’Industrie et Amar Ghoul aux Transports, a fini de recomposer le puzzle sur le plan politique. Surtout qu’au niveau du gouvernement, les «hommes» du Président ont été placés dans les postes stratégiques impliqués dans l’organisation des élections, à savoir l’Intérieur (Belaïz) et la Justice (Louh), sans parler du Conseil constitutionnel (Medelci). La boucle est ainsi bouclée. Il ne restait que les médias lourds à bâillonner pour parfaire la conspiration qui se prépare, avec pour seul objectif de réélire un président malade.
Amine Sadek
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