La violence banalisée
Par Karim Bouali – Les téléspectateurs qui ont suivi le match MCA-USMH retransmis en direct à partir du stade de Bologhine ont eu tous, très certainement, la même réaction mêlant l’étonnement à l’effroi en lisant la longue banderole qui couvrait toute la partie de la tribune réservée aux supporters harrachis : «Nous avons eu le courage de venir ici, venez à Guantanamo si vous en avez !» Il faut être connaisseur du monde footballistique algérien pour comprendre que Guantanamo, c'est le nom donné par ces supporters au stade du 1er-Novembre d'El-Harrach. Le commentateur est resté muet sur cette image comme s’il trouvait que le message était «normal» ou alors il n’en a pas compris la signification, ou tout simplement pense-t-il, peut-être, que son travail consiste à décrire ce qui se passe sur le terrain, pas autour. Mais surtout personne, s’agissant du service d’ordre bien sûr, n’a eu le «courage» – pour reprendre le terme provocateur utilisé dans le message des Harrachis – d’empêcher que la banderole soit déployée de cette façon. Ainsi, un message porteur de violence et de haine a été étalé, durant tout le match, sur toute la longueur d’une banderole géante et avec une «visibilité» telle qu’elle rendrait fous de jalousie les annonceurs publicitaires qui, pourtant, rivalisent de génie pour faire passer leurs réclames durant ces moments de grande audience à la télé et paient très cher pour cela. Le message de haine a été diffusé gratuitement dans le stade de Bologhine. Pas la moindre amende pour ce délit : incitation à la violence. Que faut-il en penser ? Oui, le professeur Farid Kacha avait raison de dire que «les autorités alimentent la violence sans s'en rendre compte» (voir interview à Algeriepatriotique du 18 mars 2013). A partir de cas précis, il avait tiré la conclusion que «les autorités font inconsciemment en sorte que la violence augmente». Il reste mesuré dans son jugement : «Je ne dis pas que l’Etat suscite la violence volontairement. Mais force est de constater que tout est fait pour l’alimenter. Absolument tout.»
K. B.
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