L’ancien patron des renseignements français : «Hollande et Fabius ont affaibli la diplomatie française»
Dans un livre à paraître le 26 novembre, Renseignement français : nouveaux enjeux, l’ancien patron du contre-espionnage français, Bernard Squarcini, révèle la mauvaise gestion de certains grands dossiers par les autorités françaises, notamment le dossier syrien qu’il qualifie de «fiasco politico-médiatique de nature à affaiblir durablement la position diplomatique de la France». L’ancien patron de la DCRI écrit que l’expression «nous estimons» employée fréquemment dans le document intitulé «Synthèse nationale de renseignement déclassifié», supposé démontrer qu’une attaque a été conduite dans la nuit du 21 août 2013 près de Damas, sur la Ghouta-Est, laisse entendre «qu’aucun fait avéré n’est disponible» et de ce fait, il est seulement possible de produire de simples hypothèses et analyses. Il indique que la phrase «nos services ont récupéré sur le terrain…» ne signifie qu’une seule chose : les agents locaux de la rébellion «nous ont transmis des échantillons», et quant à «nos services disposent d’informations, de source nationale…» peut aussi bien signifier que la DGSE et la DRM ont intercepté des communications qu’il leur est difficile d’en attribuer avec certitude la provenance. Pour ce qui est de l’appui des renseignements de plusieurs partenaires, Squarcini se reporte directement vers les services américains, britanniques et turcs. Pour cet ancien des renseignements, ce document n’est pas suffisant pour envisager des bombardements punitifs contre la Syrie. «Ce document rassemble un faisceau d’analyses convergentes (…) En définitive, cette note de notes n’est pas conclusive et certainement pas suffisante pour fonder, de manière imparable, la nécessité de déclencher des bombardements de représailles», explique-t-il, et de renchérir en s’interrogeant : «De fait, doit-on prendre le risque d’engager un acte de guerre – sans pouvoir envisager la guerre d’après – sur la base d’estimations et de probabilités ?» Squarcini charge Laurent Fabius qui continue à vouloir faire la guerre en Syrie alors que, selon lui, des chancelleries régionales et occidentales savent parfaitement qu’aucune issue militaire ne peut clore la crise syrienne et qu’il faudra, tôt ou tard, revenir à la table des négociations. Il l’accuse d’avoir «coupé» tous les ponts avec Damas. «Depuis l’arrivée de Laurent Fabius au Quai d’Orsay, tous les ponts ont été coupés avec Damas parce que Paris mise sur la chute du régime. Bachar Al-Assad est toujours là», explique-t-il encore en avouant que «la gestion de la crise syrienne par la diplomatie française défie toutes les logiques sans que l’on comprenne très bien à quelle motivation répond notre diplomatie, et surtout, au bénéfice de quels intérêts».
Mohamed El-Ghazi
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