Guerrara en état de siège après des heurts entre ibadites et malékites
La ville de Guerrara, à 100 km au nord-est de la vallée du M’zab, retrouve progressivement son calme après avoir été, hier, le théâtre d’affrontements intercommunautaires. D’importants renforts policiers ont été dépêchés de Laghouat et Djelfa pour sécuriser cette ville, minée par des conflits entre les deux communautés qui la peuplent, mozabites d’un côté et arabophones de l’autre. Craignant de nouveaux débordements, les habitants ont préféré rester chez eux. «Les affrontements d’hier ont marqué les esprits. La ville n’a jamais vécu un tel déchaînement de violence que des tensions autour d’un match ne peuvent justifier. La population est sous le choc», raconte un habitant qui n’écarte pas la reprise des affrontements. «Les gens sont à bout de nerfs et il suffit d’une petite étincelle pour rallumer le brasier», poursuit-il. Comme lui, de nombreux autres habitants dénoncent cette violence qui a causé des dégâts importants : dégradation du stade, saccage de nombreux commerces et habitations, et destruction d’équipements publics. La ville est assiégée par les forces antiémeutes qui se sont fortement déployées dans les quartiers chauds pour prévenir d’autres accrochages entre les deux communautés dont les quartiers sontt séparés par une route. Les tensions intercommunautaires ne datent pas d’aujourd’hui à Guerrara. Elles ont toujours existé et se manifestent périodiquement lors de certains événements qui les exacerbent. Comme d’autres villes de Ghardaïa, Guerrara a été également secouée par les douloureux événements qui se sont produits en 2007 et 2009. A Berriane justement, les communautés ibadite et malékite n'ont pas encore fait la paix depuis le dernier conflit dans lequel elles se sont affrontées à mort. A Guerrara aussi. Historiquement peuplée par des Mozabites, foncièrement conservateurs, Guerrara a connu des mutations sociales et surtout un mélange tectonique de populations venues de partout qui n’ont, donc, pas forcément la même culture et les mêmes habitudes. Ce qui s’est passé hier à Guerrara ressemble beaucoup à l’épisode dramatique vécu par les habitants de Berriane en 2007. Les deux communautaires, mozabite et arabophone, ont du mal à cohabiter. Des tensions qui sont aggravées par les difficultés de la vie quotidienne, le chômage et la baisse considérable du pouvoir d’achat des familles. Bien que les Mozabites commercent avec les autres, le courant entre les deux communautés passe difficilement. Les liens commerciaux sont loin d’être solides pour résister au poids des traditions et des atavismes qui ressurgissent à nouveau. A l’instar de Guerrara aujourd’hui, toutes les villes de la vallée du M’zab vivent des tensions intercommunautaires qui ne conjecturent rien de bon pour l’avenir de cette région. Le risque de nouveaux affrontements est omniprésent.
Sonia B.
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