Appareils de chauffage défectueux, un plan de bataille tardif
Chaque hiver, c’est la même alerte aux émanations de monoxyde de carbone dues à des appareils de chauffage ou des chauffe-eau défectueux. Près de Sedrata (Souk Ahras), dans une mechta, 4 personnes – un homme âgé de 36 ans, son épouse (33 ans) et leurs deux enfants, un garçon (3 ans) et sa sœur âgée d’à peine un an – sont mortes asphyxiées par des émanations de gaz butane vendredi après-midi. Hier, à Tissemsilt, ce sont 6 personnes qui ont failli périr pour la même raison. Des informations font état également d’accidents survenus dans des écoles. A Batna, cinq élèves d’une classe préparatoire dans une école primaire ont été pris d’évanouissement après avoir inhalé du monoxyde de carbone provenant d’un radiateur à gaz. La cheminée qui permet l’évacuation du gaz imbrûlé avait été obstruée pour éviter la nidification de pigeons. La semaine dernière, 4 personnes ont été brûlées à des degrés divers suite à l’explosion d’une bonbonne de gaz butane à l’intérieur d’un appartement situé au village d’Ighil Tazarth, dans la commune de Larbâa Nath Irathen (30 km au sud-est de Tizi Ouzou). Les communiqués de la Protection civile rapportent presque chaque jour des accidents de ce genre. A fin septembre, 231 personnes sont mortes en inhalant le monoxyde de carbone, dégagé par des appareils de chauffage défectueux, et plus de 2 253 personnes ont été sauvées. Ce phénomène ne date pas d’hier, mais c’est seulement ces jours-ci que les pouvoirs publics ont décidé, pour y faire face, de mettre en place ce qu’ils appellent une task force constituée par les différents ministères (Santé, Intérieur, Commerce, Energie). En fait, le coût social et économique de ce fléau est devenu insupportable. La facture serait trop lourde pour l’Etat, à travers l’hospitalisation de milliers de blessés, la surconsommation d’énergie électrique, la mobilisation des moyens de la Protection civile et des différents corps de sécurité. Le plan de bataille tardif annoncé par le ministre du Commerce, Mustapha Benbada, n’a rien d’extraordinaire, il relève de l’exercice le plus élémentaire du service public : agir en amont, en établissant un contrôle rigoureux de la conformité des appareils de chauffage importés et obliger en aval les importateurs et revendeurs de ce type d’appareils à fournir toutes les informations au consommateur. Pourquoi avoir attendu si longtemps pour engager ce plan ? Mais il faut s’interroger surtout sur sa mise en œuvre, connaissant la vulnérabilité des organes de contrôle au fléau de la corruption en Algérie. Les associations de consommateurs, pour leur part, semblent inefficaces et rien ne garantit les citoyens contre les appareils défectueux importés et vendus dans des marchés dominés par l’informel où la facture est totalement absente et le certificat de garantie complètement inconnu.
Kamel Moulfi
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